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Foin d’hypocrisie, l’Europe est fédérale !

L’Europe n’est peut être pas si éloignée du modèle fédéral que d’aucuns honnissent. Démonstration-fiction aux faiseurs d’hypocrisie

(Archives B2) Il est peu de réunions européennes où les mots de fédération, de constitution, de pouvoir supranational, ne reviennent. Il est peu de discussions ne fâchent tels des gros mots. Au sommet de Nice, prudents, les Quinze chefs d’État et de gouvernement ont préféré botter en touche et renvoyer à plus tard toute discussion sur l’avenir de l’Europe, sous la présidence belge par exemple. Or, bien que la plupart des dirigeants européens ne veulent se l’avouer, ces mots représentent déjà une part de notre quotidien.

Ainsi l’Europe dispose déjà d’une Constitution sous la forme des deux traités de Rome, en 1957, et de Maastricht, en 1992, amendés à plusieurs reprises. Mieux, ou pire c’est selon, ces textes ont acquis une valeur supranationale. Toute modification d’un traité européen oblige le pays qui le ratifie à modifier sa propre constitution nationale si elle s’avère contraire aux objectifs communautaires. Au-delà de cette « loi fondamentale » , l’Europe dispose de tout un corpus de textes - directives, règlements, décisions, recommandations - qui forment une « loi européenne », qui, là encore l’emporte, sur toute disposition nationale contraire.

Quant au pouvoir législatif, il est partagé entre deux chambres, selon une répartition classique au modèle fédéral : une chambre des députés élue directement par le peuple, le Parlement européen, et une chambre représentant les États, dans laquelle siègent les gouvernements, le conseil de l’Union européenne, désigné en quelque sorte au deuxième degré par le peuple et où les ministres ont un nombre de voix plus ou moins représentatif de l’importance de leur État. D’où l’importance des discussions de Nice sur la pondération des voix. La Commission européenne joue le rôle du conseil des ministres en France en préparant les « lois » et veillant à leur application. Dans cet imbroglio institutionnel, « cette construction particulièrement originale » comme la dénomme Lionel Jospin, il ne manque en fait qu’un chef de l’État.

Ajoutez à cet ensemble, un drapeau, une monnaie unique, l’euro, qui débarquera dans nos poches en 2002, une armée commune qui sortira du couvert en 2003 et l’Union européenne ressemble davantage à un État fédéral, peut être pas parfait ni toujours efficient, qu’à une vague communauté d’États liée par une convention de libre échange.

Nicolas Gros-Verheyde, à Nice (Paru dans France-Soir décembre 2000)

Nicolas Gros-Verheyde

Rédacteur en chef du site B2. Diplômé en droit européen de l'université Paris I Pantheon Sorbonne et auditeur 65e session IHEDN (Institut des hautes études de la défense nationale. Journaliste depuis 1989, fonde B2 - Bruxelles2 en 2008. Correspondant UE/OTAN à Bruxelles pour Sud-Ouest (auparavant Ouest-France et France-Soir).

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