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Une menace de paille

La menace de rétorsion autrichienne contre l’Autriche pourrait bloquer des mesures anti discriminations.

(archives B2) Même pas peur ! Telle pourrait être la réponse des Quinze à la menace de Jörg Haider de boycotter les instances européennes. L’insinuation du extrémiste rappelant à l'Union européenne qu’elle avait besoin de la voix de l'Autriche dans son mécanisme décisionnel n’a, en effet, pas fait bougé d’un iota Bruxelles. Certes la Commission européenne « reste vigilante », assure un porte-parole de l’institution.

Mais, politiquement, cette position « va contre l’esprit de toutes les déclarations du nouveau gouvernement autrichien qui fait son possible pour rassurer ses partenaires européens ». De plus, l’Europe de 2000 n’est plus l’Europe de 1957. Nombre de décisions européennes doivent aujourd’hui être approuvées seulement à la majorité qualifiée. Chaque pays disposant d’un nombre de voix proportionnel à son importance, l’Autriche ne pèse donc, dans ce type de vote, que faiblement. Avec seulement 4 voix sur 87, il lui faut en effet l’apport au minimum de trois autres États dont deux « grands » (France, Allemagne, Italie, Espagne, Royaume-Uni) ou de 7 autres « petits » États pour bloquer une décision. Et, toute opposition autrichienne pourrait avoir un effet contraire à celui recherché. Des États pourtant peu réticents à voter un texte pourraient être amenés à retourner leur vote pour éviter d’être mis dans le même sac que l’Autriche.

Il n’en demeure pas moins que le vote à l’unanimité perdure dans certains domaines d’importance. Et face à un tel blocage, la Commission européenne ne peut rien faire. Les sanctions prévues par les Traités ne concernent pas en effet le fonctionnement des institutions communautaires mais uniquement l’atteinte « grave et persistante » aux libertés fondamentales.

Les toutes nouvelles politiques extérieures ou de défense pourraient ainsi pâtir par ce boycott. De même que certains décisions d’harmonisation fiscale ou de libre circulation des travailleurs. Mais ce sont surtout plusieurs propositions de la Commission qui doivent être discutées aux prochains conseils des ministres : en matière de visa et d’immigration, ou pour lutter contre les discriminations raciales et sexuelles qui pourraient ainsi être retardées. Des symboles dont justement la nouvelle Autriche de Schlüssel se passerait bien.

Nicolas Gros-Verheyde

(article paru dans France-Soir)

Nicolas Gros-Verheyde

Rédacteur en chef du site B2. Diplômé en droit européen de l'université Paris I Pantheon Sorbonne et auditeur 65e session IHEDN (Institut des hautes études de la défense nationale. Journaliste depuis 1989, fonde B2 - Bruxelles2 en 2008. Correspondant UE/OTAN à Bruxelles pour Sud-Ouest (auparavant Ouest-France et France-Soir).

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