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Les premières leçons de l’opération en Libye selon l’Amiral Guillaud

(BRUXELLES2) Le chef d’état-major des armées françaises, l'amiral Edouard Guillaud, a commencé à tirer publiquement les leçons de l'opération en Libye. C'était devant l'Assemblée nationale les leçons de l'opération en Libye, début octobre.

les mécanos du BPC Tonnerre remontent les pales d'une Gazelle (crédit : DICOD/Ministère Français de la défense)

La « grande leçon » de l'intervention en Libye, c'est que « aucune armée, de l’air, de terre ou de mer, ne détient seule la capacité de résoudre une crise. C’est leur complémentarité et la combinaison de leurs moyens qui donne de l’efficacité à l’action militaire. C’est aussi leur niveau de préparation, d’entraînement et de réactivité qui permet d’agir vite et d’aller droit au but. Nous avons ainsi assisté au retour des opérations combinées, au sens où on l’entend depuis la Seconde Guerre mondiale, exigeant un mécanisme d’horlogerie que très peu de pays sont capables de réaliser. »

Autre « remarque » selon l'amiral Guillaud : « la réactivité de notre chaîne décisionnelle, pas seulement militaire, a représenté un atout dans la gestion de crises. En discutant avec mes homologues italien, britannique, allemand ou américain, je constate que nous avons atteint une forme d’équilibre que peu de démocraties ont trouvée. Cela donne au chef des armées une grande capacité d’action tout en renforçant le contrôle parlementaire de nos engagements extérieurs. » Autrement dit pour le chef d'Etat-Major, pas besoin de changer un système qui gagne et d'augmenter le contrôle parlementaire sur les opérations militaires.

Enfin, « il faut toujours se souvenir qu’une capacité ne se réduit jamais à des équipements. Elle s’adosse à une doctrine, à une organisation, à un soutien. Elle n’existe que parce que des soldats sont recrutés, formés et entraînés pour servir un système d’armes. » Et c'est au chef d’état-major des armées « de mettre en cohérence les différents piliers qui structurent une capacité ».

Le rôle des hélicoptères

L'engagement des hélicoptères de l'ALAT (l’aviation légère de l’armée de terre), très médiatisé, a été plutôt réduit en termes de nombre de sorties - une trentaine de raids - mais important en termes de destructions d'objectifs - 550 objectifs détruits. Les Français ont fait l'essentiel des frappes (90%), les 10 % restant étant effectués par les hélicoptères Apaches britanniques.

Coté aviation, les avions de l'armée de l'air et de la marine ont réalisé « environ 4 500 sorties, soit 20 000 heures de vol, représentant 25 % des sorties de la coalition, 35 % des missions offensives et 20 % des frappes avec plus de 750 objectifs militaires détruits ».

Coût de l'opération

Les surcoûts sont estimés - au 30 septembre selon l'amiral - « entre 330 et 350 millions d’euros, soit une estimation de l’ordre de 430 millions si l’opération est prolongée jusqu’au 31 décembre ». Un bilan auquel il faut ajouter certains coûts. Durant l'intervention, l'armée a « consommé 1 000 bombes, 600 missiles, 1 500 roquettes ». Conséquence, aujourd'hui, il faut « reconstituer certaines de nos capacités, avancer ou compléter des opérations de maintenance pour redonner du potentiel à nos matériels, rattraper un certain nombre de retards pris en matière de qualification des pilotes les plus jeunes ». NB : Ce coût n'est donc pas inclus dans la facture indiquée par l'amiral

Le coût des opérations extérieures en 2011, grévé par l'Afghanistan

Au final, pour 2011, l'ensemble des surcoûts des opérations extérieures pour la France « est ainsi évalué entre 1,2 et 1,3 milliard d’euros en 2011 ». Un débordement d'environ « 600 millions par rapport à l'enveloppe votée pour 2011 » (630 millions d’euros). Outre la Libye, c'est le coût de l’accroissement de la protection des forces déployées en Afghanistan qui explique cette augmentation qui serait encore supérieure si elle n'était compensé en partie « par une baisse des dépenses au Kosovo et pour Atalante ».

Dans le détail, sont dépensés : de 500 à 520 millions d'euros en Afghanistan, 430 millions en Libye, 90 millions pour le Tchad, un peu moins de 80 millions pour le Liban, 65 millions en Côte d’Ivoire, une trentaine de millions pour l'opération anti-piraterie Atalanta. Le reste des opérations coûte au total de l’ordre de 50 millions d’euros.

Nicolas Gros-Verheyde

Rédacteur en chef du site B2. Diplômé en droit européen de l'université Paris I Pantheon Sorbonne et auditeur 65e session IHEDN (Institut des hautes études de la défense nationale. Journaliste depuis 1989, fonde B2 - Bruxelles2 en 2008. Correspondant UE/OTAN à Bruxelles pour Sud-Ouest (auparavant Ouest-France et France-Soir).

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