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[Yougoslavie Mémoire d’un désastre] 1992. L’acte d’accusation des “Douze” contre la Serbie

(BRUXELLES2, opinion) Hasard des coïncidences, et des évènements, l'Union européenne a reçu juste son prix Nobel et s'est, à nouveau, prononcé sur l'élargissement aux pays de l'ex-Yougoslavie, 20 ans après la réunion d'Edimbourg, les 11 et 12 décembre. Un sommet qui a pris des décisions importantes sur nombre de points, à un moment où le Royaume-Uni dirigé par John Major comptait encore... Sans doute plus qu'aujourd'hui... car il savait bloquer mais aussi animer les débats. Ce sommet a ainsi accouché d'une déclaration sur l'ex-Yougoslavie où les mots de purification ethnique sont prononcés et le responsable désigné...

En plein siège de Sarajevo

Mais alors que le pire - Srebrenica et autres massacres - n'est pas encore survenu, les "Douze" accusent : « Les dirigeants actuels de la Serbie et des Serbes de Bosnie sont les premiers responsables du conflit et de sa brutalité. La principale victime des actions de toutes les parties a été la population musulmane de Bosnie-Herzégovine. Au mépris des résolutions du Conseil de sécurité des Nations Unies, les forces serbes de Bosnie-Herzégovine ont entrepris une campagne sauvage d'agression militaire, de "purification ethnique", de persécution et de torture de civils. »

Les criminels sont avertis

« Les auteurs de tous ces crimes contre le droit humanitaire commis par les différentes parties seront tenus pour personnellement responsables et traduits en justice. Les autorités serbes de Belgrade portent une responsabilité tout aussi grande dans la mesure où elles fomentent le conflit et s'abstiennent d'user de leur influence et de leurs moyens incontestables pour le contenir. »

Les Serbes sont placés devant un choix

« La nation serbe se trouve devant un choix clair et imminent. Si un changement radical de politique intervient et qu'une coopération véritable au processus de paix s'instaure, la Serbie sera progressivement réintégrée au sein de la communauté internationale. (...) Si, en revanche, le régime de Belgrade poursuit sa politique actuelle, la communauté internationale durcira son action, entre autres en renforçant et en étendant les sanctions existantes et en faisant obstacle à la participation serbe à toute institution internationale, ce qui isolera totalement, et pour longtemps, la Serbie. »

Et certains principes intangibles sont rappelés

« Le Conseil européen rappelle que la communauté internationale n'admettra pas l'acquisition de territoires par la force. Elle n'acceptera pas davantage la partition de la Bosnie-Herzégovine. »

Bien sûr...

...Ce ne sont que des mots. Mais à comparer avec les dernières productions du Conseil sur la situation en Syrie ou au Congo, on ne peut qu'être frappé devant l'affaiblissement, ou plutôt l'affadissement des propos européens sur le monde. Comme si les "27" d'aujourd'hui n'osaient plus avoir un langage simple et clair. Aujourd'hui, il serait cependant temps d'en tirer la leçon, et de mesurer le chemin parcouru par la Serbie, qui mériterait de reprendre le chemin de l'Europe. Ce qui ne pourra qu'à mon sens, apaiser la situation dans la région.

Télécharger la Déclaration d'Edimbourg

NB : si vous ne l'avez déjà fait, visionnez de petit film réalisé par les services du Conseil de l'UE, à l'occasion de la remise du prix Nobel. C'est à mon sens une des meilleures productions audiovisuelles du moment qui quitte le ton un peu compassé habituellement employé par les productions institutionnelles (de plus on peut choisir le sous-titre dans la langue souhaitée).

Nicolas Gros-Verheyde

Rédacteur en chef du site B2. Diplômé en droit européen de l'université Paris I Pantheon Sorbonne et auditeur 65e session IHEDN (Institut des hautes études de la défense nationale. Journaliste depuis 1989, fonde B2 - Bruxelles2 en 2008. Correspondant UE/OTAN à Bruxelles pour Sud-Ouest (auparavant Ouest-France et France-Soir).

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