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Golfe Moyen-Orient

L’embargo sur les armes contre la Syrie ? La Croatie a pris son temps

Un Illyouchine de la compagnie JIAC a été reperé à l'aéroport de Pleso-Zagreb début janvier (crédit : JIAC - archives)

(BRUXELLES2) Ce n'est que le 21 février - selon les informations recueillies par B2 - que la Croatie a décidé de suivre les sanctions adoptées par l'Union européenne en novembre contre la Syrie. Une adoption bien tardive pour un pays qui n'est pas seulement adhérent mais déjà présent - en tant qu'observateur - dans toutes les structures européennes. Ses représentants participent ainsi à toutes les prises de décision - que ce soit au niveau des ministres (Conseil de l'UE), des ambassadeurs (Coreper et Cops) ou des experts (groupes de travail).

Un temps mis à profit

Techniquement, la Croatie n'était donc pas tenue jusqu'au 22 février (date où la décision a été publiée au Journal officiel) de respecter l'embargo sur les armes. Ce qui lui a permis - si les informations de plusieurs bloggers relayées par le New York Times sont exactes - de livrer sans coup férir des lots d'armes en stock dans plusieurs régions de Syrie à la fin de l'année et début janvier des stocks d'armes. Selon les journaux croates, comme Jutarnji list, plusieurs avions cargo jordaniens ont ainsi été aperçus sur l'aéroport croate de Pleso (Zaghreb), début janvier. Ces armes n'avaient pas auparavant été observées dans le conflit : des fusils sans recul M60, lance-roquettes anti-char Osa M79 (fabriqué dans l'ex-Yougoslavie), des RPG-22, des lance-grenades Milkor MGL/RBG-6. Et elles ont été utilisées par des forces rebelles, laïques ou modérés religieux (sauf ceux de Jabhat al-Nusra), pour reprendre certains quartiers.

Juste retour à l'envoyeur ?

Ces armes proviendraient de stocks détenus en Croatie, datant de la guerre d'ex-Yougoslavie. Mais non déclarés. Et pour cause ! Ces armes avaient finalement atterries, à l'époque, en Croatie pour se défendre contre les Serbes et assurer la reconquête de certains territoires. Et, déjà, pour les livrer l'embargo sur les armes (imposé là encore fois par Européens) avait été contourné. Au moins, ici, formellement, la règle aura été tenue, même si c'est au prix d'un artifice juridique... subtil.

Nicolas Gros-Verheyde

Rédacteur en chef du site B2. Diplômé en droit européen de l'université Paris I Pantheon Sorbonne et auditeur 65e session IHEDN (Institut des hautes études de la défense nationale. Journaliste depuis 1989, fonde B2 - Bruxelles2 en 2008. Correspondant UE/OTAN à Bruxelles pour Sud-Ouest (auparavant Ouest-France et France-Soir).

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