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Un dîner, à 27, très politique mais sans concret

(BRUXELLES2) (A Gand) Le dîner du jeudi soir, entre ministres seuls, a été de l'avis de tous une bonne occasion de discussion, à bâtons rompus, très politique. Cela avait failli mal commencé. Tout d'abord Cathy Ashton qui intervenait par video-conférence a dû patienter, quelques longues minutes, toute seule, devant son écran, que les ministres veuillent bien rejoindre la salle de réunion, se mettre à table et l'écouter. Et les débuts de la discussion ont été plutôt laborieux. Certains ministres ont commencé à lire leur papier. Et on pouvait craindre que le dîner soit, donc une discussion pour rien. Puis les ministres se sont déridés, "ont levé le nez de leur assiette et on commencé à parler librement", comme le raconte un participant. La conversation s’est alors animée autour de questions très politiques…

Le ministre français de la Défense, Hervé Morin, a été le plus direct : « Il ne faut pas se cacher derrière la crise ; il y a actuellement une absence de volonté politique. Sans mutualisation et coopération plus forte, l'Europe va perdre sa capacité d’expertise. Nous devons prendre des décisions. Aujourd’hui aucun État européen n’est pas capable de jouer un rôle complet au niveau industriel. » En gros, ce sera l’Europe ou rien (A lire aussi : des propos du ministre, décoiffants).

Renforcer l'Agence européenne de la Défense, oui mais

Le ministre allemand Karl Theodor Zu Gutenberg, a insisté, lui aussi, sur la nécessité de coopérer et de renforcer l’Agence européenne de défense. Mais il a aussi exprimé certaines nuances, notamment les « limites nationales » à cette coopération dont il faut tenir compte, a-t-il ajouté. En Allemagne (NB : mais aussi dans plusieurs autres pays), « nous avons une obligation de faire approuver par le Bundestag toutes les opérations ; ce qui pose des limites. Il en ainsi en Afghanistan où les Allemands ont décidé de fournir 90 instructeurs de plus pour l'armée afghane, mais en retirant les équipages des Tornado. Ce afin de ne pas franchir la limite fixée par le Bundestag et de ne pas utiliser la réserve.

Plusieurs ministres ont ainsi à souligner la nécessité de trouver davantage de coopérations et de renforcer l'Europe de la défence, avec parfois des nuances. Comme l'a résumé le ministre belge de la défense, hôte de la réunion, Pieter de Crem : « le contexte économique joue. On sent un besoin de coopérer et d’optimiser tous les moyens. Il y a déjà des résultats concrets. » Mais on ressent aussi un certain « mécontentement sur la façon dont la coopération militaire a été conduite jusqu’à aujourd'hui. Cette coopération doit s’améliorer. On a senti une politique forte pour vraiment réaliser les instruments et les ambitions de Lisbonne. »

Le couac britannique

Seul couac. Le ministre britannique, Gérarld Howarth, a tenu à rappeler ses homologues à la tradition. Il y a un forum de coopération, « c’est l’OTAN », mettant en lumière, selon certains participants, la faiblesse actuelle de l’Agence européenne de défense, son manque de pragmatisme et de projets concrets... En clair, le Royaume-Uni ne veut, toujours, pas entendre parler d'Europe de la défense et préfère 10 fois mieux des coopérations bilatérales...

(Nicolas Gros-Verheyde)

Nicolas Gros-Verheyde

Rédacteur en chef du site B2. Diplômé en droit européen de l'université Paris I Pantheon Sorbonne et auditeur 65e session IHEDN (Institut des hautes études de la défense nationale. Journaliste depuis 1989, fonde B2 - Bruxelles2 en 2008. Correspondant UE/OTAN à Bruxelles pour Sud-Ouest (auparavant Ouest-France et France-Soir).

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