B2 Le Quotidien de l'Europe géopolitique. Actualité. Dossiers. Réflexions. Reportages

Piraterie maritime

Rear-Admiral Hudson (Uk): commander Atalanta, un “défi revigorant”

(BRUXELLES2 / A Göteborg) Une réunion informelle, c’est aussi l’occasion pour un journaliste de faire quelques rencontres, sur le bord d’une table. Göteborg n'a pas failli à la tradition. Le contre-amiral britannique Hudson - qui commande actuellement la force  anti-piraterie de l’UE « Atalanta » dans le Golfe depuis juin dernier – faisait naturellement partie des personnes que je voulais voir.  L'interview était expresse - moins de 8 minutes tout compris - mais productive... Hudson a le tempérament que j'aime chez les Britanniques, chaleureux, direct, très politique également. Ainsi, il est resté toujours très prudent veillant bien à ne pas déborder de son rôle

© NGV / B2

Normalement en poste jusqu’à juin 2010, la principale tâche d'Hudson est aujourd'hui d’assurer la continuité de l’opération Atalanta en 2010. Naturellement, c’est par cela que nous avons commencé ! Le commandant a ainsi confirmé les futurs commandements de la force (lire aussi), précisé ce qui lui manquait (des avions de patrouille notamment), commenté l’atout de l’Awacs (précisions ici) et mentionné les négociations en cours d'accords de transfert des pirates (Seychelles et Tanzanie, lire aussi). Nous avons enfin parlé de ce que cela lui  apportait de commander Atalanta ("une grande opportunité de découvrir la PESD"), et de l’engagement britannique dans la PESD (sujet délicat…).

• La génération de force pour l’année 2010 avance, que vous manque-t-il
« Les pays ont été très généreux car ils réalisent l’utilité de cette mission. Ils ont fourni des navires, des hommes, des avions. Mais nous manquons encore d’avions de patrouille. Le Luxembourg, l’Espagne, l’Allemagne, la France nous en ont offerts. Mais, pour couvrir cette énorme zone, de deux millions de m2, nous devons avoir des matériels en plus, pour repérer les navires pirates. »

• Qui va assurer le commandement de la force durant cette période, les Italiens, les Français... ?
« Effectivement. Après les Néerlandais, le commandement de force sera assuré d'abord par l’Italie, puis la Suède et enfin la France ».

• Les Français ont mis à disposition un Awacs début septembre. Utile ?
« L’avantage de l’Awacs est qu’il permet de couvrir une grande zone. Son efficacité, c’est qu’il nous permet de donner une image claire de la zone, de repérer les navires marchands présents dans la zone, davantage que de possibles bateaux pirates. Nous pouvions ainsi mieux avertir des risques courus ou leur conseiller des routes. »

• Pour le transfert des pirates, où en êtes-vous ? Après le Kenya, les Seychelles, la Tanzanie, d’autres accords en perspective ?
« De façon générale, nous discutons avec tous les Etats de la région: Djibouti, Yemen, Oman, Maurice, Madagascar, Tanzanie. Nous avons un bon accord avec le Kenya. Et, effectivement, nous travaillons pour arriver à un accord avec les Seychelles. On va continuer de travailler avec la Tanzanie. Dans ce pays, y a un consensus national sur la piraterie, ils sont très sensibles à cette question. Quant à un accord, il est trop tôt le dire, il y a encore un certain nombre de points à régler. »

• On est davantage habitué à voir des commandants britanniques à l’OTAN qu’à l’UE….
« C’est vrai (rires). »

• … pour vous personnellement, professionnellement qu’est-ce que çà change ?
« C’est un grand défi, personnel, professionnel. C’est une opportunité professionnelle à laquelle je n’étais pas préparé, pas habitué : la PESD, avec tous les aspects de la gestion de crise croisée. C’est très revigorant personnellement. »

• Cet engagement implique-t-il un changement dans l’attitude britannique sur la PESD ?
« Pour la PESD, je ne suis pas votre homme, je suis un militaire. C’est une décision totalement politique. Militairement, nous participons (à la PESD) sur une base du cas par cas. Le Royaume-Uni est complètement engagé dans Atalanta. Et nous nous réjouissons du succès de l’opération. ».

• Voyez-vous une différence entre une opération OTAN et une opération UE?

« Nous ne devons pas perdre de vue qu’il y a actuellement 20 nations qui opèrent dans le Golfe : les bateaux de l’UE, ceux de l’Otan et les forces nationales de plusieurs pays (Inde, Russie, Malaisie Corée, …). Le grand avantage que nous avons est d’avoir le même objectif pour dissuader, perturber, supprimer la piraterie. Ceci dit, l’UE, l’OTAN, les autres nations peuvent avoir des mandats et des objectifs, des motivations différentes. Mais le fondement de notre présence, à tous, dans le Golfe est commune. Il y a une convergence politique et  militaire, pour fournir un soutien stratégique utile au commerce mondial, être sûr que les navires les plus vulnérables sont protégés, que l’aide humanitaire arrive bien. Sur le terrain (« on the ground »), sur mer, nous avons le même objectif. Et çà marche bien. Nous travaillons de façon très collective. »

(Nicolas Gros-Verheyde)

Nicolas Gros-Verheyde

Rédacteur en chef du site B2. Diplômé en droit européen de l'université Paris I Pantheon Sorbonne et auditeur 65e session IHEDN (Institut des hautes études de la défense nationale. Journaliste depuis 1989, fonde B2 - Bruxelles2 en 2008. Correspondant UE/OTAN à Bruxelles pour Sud-Ouest (auparavant Ouest-France et France-Soir).

s2Member®