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18 mois après le début d’Atalanta (2): la remise à la justice marque le pas

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(crédit photo : EUNAVFOR atalanta)

(BRUXELLES2) Il est un fait incontournable, la remise des suspects à la justice marque le pas. Ces derniers mois, si l'interception des pirates a connu un bond, le taux de traduction en justice a en effet fléchi, du fait du manque de pays d'accueil.

Cette saison, toutes forces confondues, près de 400 pirates ont ainsi été interceptés et désarmés (la saison correspond à la fin de la mousson d'hiver, fin février). Mais peu ont été traduits en justice : juste 2 sur 10, alors que ce taux était de plus de 5 sur 10 l'année dernière. Et encore ce taux n'est maintenu à ce niveau que grâce aux remises à la justice au Puntland, province autonome de Somalie, faites par la France sous pavillon national (1).

Le cap des 1000 suspects interceptés depuis avril 2008

Depuis la recrudescence des attaques pirates - que je date à la capture du Ponant -, selon mon bilan remis à jour régulièrement (2), toutes forces confondues (locales, nationales, multinationales), on a ainsi passé le cap des 1000 suspects arrêtés et désarmés (1064 selon un dernier décompte)

Sur ce chiffre, 469 ont été remis à la justice, la grande majorité dans les Etats riverains : 165 en Somalie (138 au Puntland et 27 au Somaliland), 123 au Kenya, 95 au Yemen, 42 aux Seychelles (dont 11 ont été libérés). 44 ont cependant été rapatriés selon la loi de compétence universelle contenue dans la convention de Montego Bay (Etat du pavillon, de l'armateur ou de l'équipage) : 15 en France, 12 aux Etats-Unis, 10 en Allemagne, 5 aux Pays-Bas, 2 en Espagne.

Sur les suspects remis à la justice, 111 ont été condamnés : essentiellement ceux remis au Puntland, un procès est terminé au Kenya. Aucune condamnation n'a encore été prononcée dans les pays de "rapatriement". Des jugements sont attendus de façon imminente au Yemen.

On peut remarquer que sur ce bilan, la moitié des arrestations a été effectuée par les forces européennes d'EUNAVFOR Atalanta : 510 suspects interceptés dont 176 ont été remis à la justice, le restant ayant été désarmé et libéré et le bateau-mère détruit, selon le principe défini par le commandant d'opération. 32 pirates sont toujours à bord de la frégate française La Fayette (une livraison au Puntland reste possible).

NB : Mon bilan diffère un peu du bilan officiel. Je prends en compte l'opération à laquelle appartient le navire quand les pirates sont arrêtés et non quand la remise en justice est effectuée. En effet, dans plusieurs cas (notamment pour la livraison au Puntland), les navires français d'EUNAVFOR ont repris, le temps de livraison, leur pavillon national. Une couverture formelle juridique et politique mais qui ne répond pas aux impératifs opérationnels.

(Nicolas Gros-Verheyde)

(1) Lire : Livrer les pirates ou les libérer ? Puntland ou pas
Puntland
 

(2) Lire :  Bilan des opérations anti-piraterie
(EUNAVFOR Atalanta, CTF
)

Nicolas Gros-Verheyde

Rédacteur en chef du site B2. Diplômé en droit européen de l'université Paris I Pantheon Sorbonne et auditeur 65e session IHEDN (Institut des hautes études de la défense nationale. Journaliste depuis 1989, fonde B2 - Bruxelles2 en 2008. Correspondant UE/OTAN à Bruxelles pour Sud-Ouest (auparavant Ouest-France et France-Soir).

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