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La Coopération structurée permanente : ouuh la la la ! C’est urgent d’attendre…

(BRUXELLES2) La Coopération structurée permanente (CSP) en matière de défense, prévue par le Traité de Lisbonne (1), ne sera pas mise en oeuvre tout de suite. Prévue pour donner une certaine consistance aux Etats disposés à aller de l’avant dans la défense européenne, dans la foulée de la déclaration franco-britannique de St Malo - sorte de noyau dur de l'Europe de la défense - cette disposition semble aujourd’hui un peu laissée de coté et, surtout, compliquée à mettre en œuvre. Que doit-elle faire ? Qui en sera membre ?

Complexe, difficile, dépassée ? Le général Bentegeat, qui présidait son dernier comité militaire, mercredi, l'a reconnu devant la presse quand je lui ai posé la question. « C’est un sujet complexe et difficile. Il n’y aucune urgence à le mettre en place tout de suite. Il faut laisser la présidence espagnole lancer son propre programme maintenant. Je ne suis pas sûr que ce projet puisse être appliqué dans sa forme prévue initialement. Depuis 2001, beaucoup de choses ont changé. Notamment l’Agence européenne de défense a été mise en place. »

Toute la question est de savoir quelles tâches cette coopération pourrait remplir et surtout - comme l'explique le général « quels critères adopter pour déterminer les pays qui en seront membres ». « Ce ne doit être en aucun cas un processus qui conduise à l’exclusion de certains Etats européens » ajoute-t-il.

De fait, dans les couloirs du Conseil, alors que de multiples decisions se préparent, aucune ne concerne la Coopération structurée permanente. Personne ne semble très pressé de s'engager dans un nouveau "machin". On attend les présidences suivantes : Espagnole, Belge, voire Polonaise (qui a décidé de faire de l'Europe de la Défense une de ses priorités).

Il est urgent d'attendre. Il est vrai que la PESD aujourd'hui, 10 ans après sa création, offre déjà de nombreuses possibilités de coopérations renforcées. De façon assez souple, chacun participe aux opérations (s'il en a envie et avec les moyens qu'il souhaite) ou aux projets industriels - via l'Agence européenne de défense ou des dispositifs ad hoc... Et ces coopérations "à la carte" ne regroupent pas systématiquement les mêmes Etats membres. Voire même jamais. Certes la France ou la Belgique se retrouvent dans quasiment toutes les actions de la PESD. Mais ce n'est pas une règle, et cela ne suffit pas à constituer un noyau consistant pour la Coopération renforcée permanente. Et cela conduit à l'exclusion de certains. Alors... il est urgent d'attendre.

NB : Ce qui, au passage, n'est pas tout à fait en règle avec le Traité de Lisbonne qui prévoit une entrée en vigueur de la CSP "dès l'entrée en vigueur du Traité de Lisbonne".

(Nicolas Gros-Verheyde)

(1) Ce nouveau dispositif est établi à l'article 42 du nouveau Traité de façon assez laconique : «Les États membres qui remplissent des critères plus élevés de capacités militaires et qui ont souscrit des engagements plus contraignants en la matière en vue des missions les plus exigeantes, établissent une coopération structurée permanente dans le cadre de l'Union » Les modalités de déclenchement de la coopération renforcée sont détaillés à l'article 46 et dans un protocole (le protocole n°10)

Nicolas Gros-Verheyde

Rédacteur en chef du site B2. Diplômé en droit européen de l'université Paris I Pantheon Sorbonne et auditeur 65e session IHEDN (Institut des hautes études de la défense nationale. Journaliste depuis 1989, fonde B2 - Bruxelles2 en 2008. Correspondant UE/OTAN à Bruxelles pour Sud-Ouest (auparavant Ouest-France et France-Soir).

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