La très discrète défaite française sur la Libye
(B2) Entre l'Italie et la France, sur la Libye, inutile de le préciser qu'il y a parfois de la friture sur la ligne. L'un des objectifs de la réunion des ministres des Affaires étrangères d'aujourd'hui à Luxembourg était surtout, sous couvert de répéter un message qui peut paraitre assez convenu — soutenir le processus de paix en Libye et l'envoyé spécial de l'ONU — de faire la 'paix' entre les frères ennemis européens. Un message prononcé en absence de tout représentant ministériel français (cf. encadré). Retour sur une 'petite' défaite de la diplomatie Macron.
La tentative d'OPA sur la réconciliation libyenne de Paris
Paris, avec quelque talent, était parvenu en mai dernier à prendre une tête d'avance et 'piquer' le leadership historique de l'Italie sur le sujet. En organisant une conférence réunissant les quatre principaux acteurs libyens, en annonçant une date pour les élections générales avant la fin de l'année, l'Élysée avait marqué un coup (Lire : Des élections prévues le 10 décembre en Libye. Accord historique obtenu à Paris) et, au passage, provoqué une sérieuse ire du voisin italien, furieux qu'on marche sur ses platebandes libyennes. Les diplomates transalpins — et d'autres également — taxaient l'initiative française de contreproductive et surtout d'illusoire.
La victoire à la Pyrhus
Las... le temps a montré qu'ils n'avaient pas tout à fait tort. Le compromis décroché par le président Emmanuel Macron et son ministre des Affaires étrangères Jean-Yves Le Drian s'est écroulé comme le château de sable sur lequel il était fondé. La proclamation des élections en décembre semble aux yeux de la plupart des experts comme des diplomates européens inatteignables. « On en est loin », remarque l'un d'eux. Même les Français le reconnaissent, à mi-voix.
La défaite de la diplomatie 'Macron'
La tentative française d'OPA sur le processus de la réconciliation libyenne a échoué. Chacun mise désormais sur la conférence organisée à Palerme par les Italiens en novembre pour remettre la Libye sur le droit chemin de la réconciliation. Les Européens ont ainsi tous aujourd'hui soutenu le processus de Palerme, avec Federica Mogherini a leur tête. Très peu ont parlé de la conférence de Paris. La France a subi une défaite qui, pour être, discrète est cuisante.
(Nicolas Gros-Verheyde)
Rome et Paris promettent de 'travailler ensemble'
Le ministre français Jean-Yves Le Drian n'était pas présent à Luxembourg, au conseil des ministres des Affaires étrangères de l'Union européenne, même s'il avait annoncé sa venue. D'autres occupations devaient sans doute le retenir à Paris. Mais dimanche à Rome, profitant du déplacement pour la canonisation du pape Paul VI, où il représentait le gouvernement d'Édouard Philippe, il a rencontré son homologue Enzo Moavero Milanesi, histoire de sceller un minimum de réconciliation. Les deux ministres ont tenu à « souligner l'interaction constante et fructueuse entre la France et l'Italie lors de la préparation de la conférence [de Palerme] et l'engagement de travailler ensemble afin de favoriser son issue constructive au service du processus de stabilisation de la Libye », selon le communiqué diffusé par la Farnesina.