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Combien ont coûté les frappes en Syrie ? Première évaluation

(B2) Il est toujours difficile d'évaluer le coût d'une opération telle que les frappes militaires sur la Syrie (opération Hamilton), car selon la base de coût pris en charge (coût réel total ou coût supplémentaire), on arrive à des données différentes.

On arrive ainsi à un coût entre 115 et 135 millions d'euros. Sur la base de ce dernier chiffre, presque trois quarts du budget sont consacrés aux munitions (98 millions d'euros), le reste est dû aux coûts opérationnels (17 millions pour l'aviation et 25 millions d'euros pour la marine).

Cela prend en compte :

1° les coûts des armes tirées ainsi que celui des armes non tirées (dont l'existence est reconnu côté français et coté américain).

2° le coût horaire des avions aller et retour — Rafale français, B1B américains, Tornado britanniques —, leur escorte (Mirage, Tornado, F-22), les ravitailleurs et avions de surveillance (Awacs, F-16...), mais aussi le temps de repérage préalable (moyen) pour des Awacs et avions de chasse.

3° le coût du déplacement des navires et sous-marins.

Méthodologie. Le coût des armes est calculé selon les données connues et le prix moyen public, et la base de données 'OPEX' de B2. Pour définir les coûts horaires des avions, je me suis basé sur les données du Pentagone, du gouvernement britannique après l'opération en Libye (rapport de 2011) et du Parlement français (rapport Launay 2012). Pour définir les coûts des navires, j'ai pris en référence le coût moyen mensuel d'engagement dans des opérations précédentes (Libye ou Irak), selon la base de données 'OPEX' de B2. Le cours $/Euro a été pris dans un cours moyen de 0,81 euro pour 1 dollar.

La fourchette basse du chiffre provient d'un coût relativisé au niveau opérationnel. Explication : même hors opération, les navires, les avions doivent voler ou naviguer, ne serait-ce que pour maintenir les conditions d'entraînement et de vigilance. NB : n'a pas été pris en compte le coût relativisé des munitions. Des munitions non tirées doivent en effet, au terme de leur durée de non-utilisation, être soit remises en condition, soit détruites et renouvelées.

(Nicolas Gros-Verheyde)

(Mis à jour) Nous avons reçu plusieurs messages. Certains nous demandent des précisions. Elles seront apportées au fur et à mesure des mises à jour de cet article. D'autres sont plus critiques. Les critiques portent tout d'abord le fait même de publier une telle évaluation. Ce serait faire le jeu des pacifistes, nous précise-t-on.

  • Avec ce genre d'arguments, les journalistes politiques n'écriront plus une seule ligne, car nous serions toujours accusés de faire le jeu de quelqu'un.

Elles soulignent aussi que nous n'avons pas tenu compte des retombées positives de cette frappe, notamment au plan politique.

Enfin, la méthodologie employée « trop simpliste » est aussi mise en cause.

  • Nous sommes très conscients des limites de cette évaluation, qui reste une évaluation "journalistique" et non "scientifique". Doit-prendre juste en cause le coût "marginal" engendré par ces frappes, le coût "réel" (des moyens employés) ou le coût "total" (y compris structures d'appui et de planification). Chacune de ses méthodes oblige à faire des choix, très politiques, selon ce qu'on veut démontrer. Nous avons choisi de prendre en compte le coût "réel", en relativisant certaines notions.

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Nicolas Gros-Verheyde

Rédacteur en chef du site B2. Diplômé en droit européen de l'université Paris I Pantheon Sorbonne et auditeur 65e session IHEDN (Institut des hautes études de la défense nationale. Journaliste depuis 1989, fonde B2 - Bruxelles2 en 2008. Correspondant UE/OTAN à Bruxelles pour Sud-Ouest (auparavant Ouest-France et France-Soir).

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