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Les pirates repartent à l’attaque dans le Golfe d’Aden. L’Aris 13 capturé

(B2) Les pirates somaliens ont refait parler d'eux. Ils ont attaqué et capturé, un pétrolier émirati, battant pavillon des Comores, l'Aris 13. L'information a été confirmée, mardi (14 mars) par le QG de l'opération européenne anti-piraterie (EUNAVFOR Atalanta) à Londres. Montés à bord, les pirates ont détourné le navire vers leur repère, et l'Aris 13 a été « ancré au large de la côte nord du Puntland, près d'Alula ». Selon nos dernières informations, après les premiers repérages, les pirates auraient fait bougé le navire d'une vingtaine de miles nautiques plus à l'ouest. L'Aris 13 compte huit membres d'équipage.

Un avion d'Atalanta en survol

L'information est restée en pointillé pendant quelques heures. Le capitaine du navire avait émis une alerte de détresse (mayday) disant que deux skiffs se dirigeant sur son navire dans le golfe d'Aden. À la réception de l'alerte, un P3 Orion (avion de patrouille maritime) de la Force navale de l'UE (EUNAVFOR) a immédiatement décollé de sa base à Djibouti pour repérer le pétrolier et prendre contact radio avec le capitaine du navire.

Une situation restée peu claire... jusqu'à la demande de rançon

Mais, malgré la visualisation du navire à plusieurs reprises, aucun contact n'a pu être établi. La situation à bord « est restée peu claire jusqu'à la fin de l'après-midi, lorsque le quartier général opérationnel de la Force navale de l'UE à Londres a pu établir un contact téléphonique avec le capitaine du navire ». Le capitaine a alors « confirmé que des hommes armés étaient à bord de son navire et qu' ils réclamaient une rançon pour la libération du navire ».

Une surveillance active avec les moyens du bord

« Tous les moyens disponibles de la Force navale de l'UE continuent de surveiller la situation », précise-t-on au QG d'Atalanta. C'est-à-dire, selon nos informations, essentiellement un avion de patrouille maritime qui permet « de surveiller la situation » (NB : les forces internationales n'ont pas vocation à opérer une reprise de force, surtout aussi près des côtes). L'opération ne compte plus aujourd'hui qu'un seul navire, le navire espagnol Galicia (L51) (lire : La route de l’océan indien, le Galicia la connait) et deux avions de patrouille maritime de type P3 Orion (un Espagnol et un Allemand, basés à Djibouti). Mais elle peut aussi compter sur le renfort des différents navires des marines qui croisent dans la région régulièrement (français, britannique, américain...), notamment pour les opérations de la coalition en Iraq (1).

Le retour d'une piraterie active

C'est la première attaque 'réussie' depuis 2012, mais pas la première attaque (contrairement à ce qu'indique l'agence Reuters). Il y a déjà eu plusieurs tentatives (qui n'ont jamais été très loin). Mais les militaires européens qui surveillent de près la piraterie étaient encore inquiets.

La piraterie n'est pas terminée

Tout récemment (la semaine dernière), je discutais avec un haut gradé européen sur le futur de certaines opérations telle d'Atalanta et la nécessité de les reconfigurer, voire de les clore à l'issue du mandat actuel (jusqu'à fin 2018). Il avait été très clair sur les intentions : « On ne veut pas fermer Atalanta. Car elle n’a pas fini sa mission. Il faut se rappeler que la piraterie ce sont trois éléments réunis : une question d'opportunité, des capacités et l'intention de passer à l'acte. On a limité la piraterie car on leur a coupé certaines opportunités d'agir.»

... et durera tant qu'un État solide ne sera pas établie

« Mais si on supprime ce pilier, cela repart immédiatement [comme en 2007-2008], car l'intention de passer à l'attaque demeure ». La dernière attaque le prouve amplement. « Quant aux capacités, elles demeurent (ou ont été reconstituées). Pour les supprimer, il faudrait agir sur la côte. C'est-à-dire établir des États. Il faut se rappeler que la piraterie s'est arrêtée en Méditerranée quand on a établi les États tout au long des côtes. »

Autrement dit tant que l'État somalien n'aura pas rétabli son autorité sur toutes les côtes, la piraterie restera, et il y aura besoin d'une 'béquille' internationale pour empêcher (ou limiter plutôt) toute action des pirates somaliens, en quête d'une proie et de millions de dollars flottants.

(Nicolas Gros-Verheyde)

(1) L'opération anti-piraterie de l'OTAN 'Ocean Shield' a été arrêtée à la fin 2016 Dans les faits, selon nos informations, elle avait été mise en veilleuse depuis plusieurs mois, en grande partie, faute de moyens maritimes disponibles et du fait de la diminution de la piraterie.

Nicolas Gros-Verheyde

Rédacteur en chef du site B2. Diplômé en droit européen de l'université Paris I Pantheon Sorbonne et auditeur 65e session IHEDN (Institut des hautes études de la défense nationale. Journaliste depuis 1989, fonde B2 - Bruxelles2 en 2008. Correspondant UE/OTAN à Bruxelles pour Sud-Ouest (auparavant Ouest-France et France-Soir).

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