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Attaque contre “Charlie Hebdo” : un acte terroriste (maj4)

Les voeux de Charb... (crédit : Charlie Hebdo)
Les voeux de Charb... (crédit : Charlie Hebdo)

(B2) L'attentat, ce mercredi matin (7 janvier) contre le journal satirique "Charlie Hebdo", à Paris, a fait un bilan lourd. 12 morts selon le dernier bilan (dont 8 journalistes, 2 policiers, 1 agent de nettoyage), 11 blessés dont 3-4 blessés étaient en état critique "urgence absolue" le jour du drame.

Un commando de deux personnes, « habillées de noir, cagoulées » - selon les témoignages des riverains et de la police, recueillis par les médias français (cf. France-Info), ont pénétré dans le journal, arrosant à l'arme automatique (type Kalachnikov notamment), les témoins présents. Ils n'ont pas hésité à tirer sur le policier placé en protection au journal comme sur ceux — de la brigade VTT et anti-criminalité du 11e = BAC11 —  arrivant en intervention sur place, faisant au moins une autre victime parmi les forces de l'ordre. Des slogans de "type djihadiste" (Allahu Akbar) auraient été prononcés à cette occasion, par les agresseurs.

Un acte terroriste

« Un acte d'une exceptionnelle barbarie contre un journal, des journalistes qui avaient toujours voulu montrer qu'ils pouvaient en France défendre leurs idées, cette liberté que la France protège. Un acte terroriste » a immédiatement qualifié le président François Hollande qui s'est déplacé sur les lieux dans le 11e arrondissement de la capitale française.

Des attentats déjà déjoués dans les semaines précédentes

Une réunion exceptionnelle a lieu à l'Elysée, en début d'après-midi, réunissant les ministres concernés par la sécurité nationale (Défense, Intérieur, Justice). Objectif : déterminer tous les lieux qui pourraient être la cible et doivent être protégés « de ces mêmes barbares » selon les mots même de François Hollande. « Plusieurs attentats terroristes ont été déjoués ces dernières semaines » a affirmé le président français. « Nous savions que nous étions menacés comme plusieurs pays dans le monde ».

Premiers commentaires

Des hommes organisés et bien renseignés

Cette attaque à la Kalachnikov ne ressemble pas aux précédentes vagues d'attentats qu'avait connues la France (Paris en particulier) dans les années 1986 et en 1995-96, qui utilisaient généralement des engins explosifs (colis piégés, bombes, véhicules, etc...). Elle ressemble, par le mode opératoire (utilisation d'armes automatiques puis fuite), à l'attentat de Bruxelles contre le musée Juif en mai 2014 (lire : Attentat de Bruxelles. Un homme froid, déterminé). Mais elle en diffère aussi par de nombreux aspects.

Les attaquants étaient en groupe (au moins 2) et semblaient, selon les premiers témoignages, bien organisés et renseignés, intervenant avec un véhicule et des tenues (noirs vêtus, cagoules, gilets pare-balles) ressemblant de près à des combattants ou des forces spéciales. L'attaque était planifiée. Elle a été menée à l'heure de la conférence de rédaction du journal (avec présence de tous les journalistes). Avec une volonté délibérée de viser un organe de presse, à sa tête et dans tous ses éléments. Les agresseurs n'ont pas tué, au hasard, sur tout ce qui bougeait. Sont visés les membres de la rédaction de Charlie Hebdo ou ceux qui pouvaient menacer de trop près leur retraite (comme les policiers).

Cependant certains éléments prêtent à interroger, laissant penser que l'organisation n'était pas aussi parfaite que ne le montre l'apparence : se tromper d'adresse d'abord pour Charlie Hebdo (ils sont allés d'abord aux archives), perdre plusieurs secondes pour abattre un policier déjà à terre (selon la video diffusée partout), "planter" son véhicule, oublier une carte d'identité dans un véhicule (NB : à supposer que ce soit la bonne).

Le journal satirique, à tendance anarchiste, Charlie Hebdo avait, déjà, été menacé dans le passé. Ses locaux avaient été incendiés en novembre 2011 avec un engin type "cocktail Molotov". Toute conclusion sur une origine ou une autre doit évitée de façon hâtive. Les auteurs pourraient être issus de la mouvance djihadiste extrême, comme le laissent à penser certains éléments, mais aussi avoir reçu un "coup de main" de franges ultra de l'extrême droite.

Un coup dur pour la presse dans son ensemble

Les agresseurs auraient réussi leur "coup". Parmi les victimes figurent (informations désormais confirmés) une bonne partie de l'âme du journal : Charb, le directeur du journal, et plusieurs autres dessinateurs comme Wolinski, Cabu, Tignous et Honoré, ainsi que l'économiste Bernard Marris, actionnaire du journal. La plupart des victimes étaient bien connues dans la presse dessinant ou intervenant dans plusieurs autres médias (Le Monde, Libération, Le Canard enchaîné, Marianne, L'Express, La Croix, les Inrockuptibles, Mon Quotidien, France-Inter, Arte...). Ce qui fait de cet attentat le plus grave , car il vise la presse française dans son ensemble. Parmi les blessés, on trouve aussi des signatures du journal comme le dessinateur Riss, les journalistes Philippe Lançon et Fabrice Nicolino (écologiste patenté, son blog), le webmaster, Simon Fieschi, ainsi qu'un autre policier de la brigade VTT et une passante.

(Nicolas Gros-Verheyde)

(Mis à jour) bilan ajusté par rapport au premier article, noms des victimes complétés, et premiers éléments d'analyse.

Nicolas Gros-Verheyde

Rédacteur en chef du site B2. Diplômé en droit européen de l'université Paris I Pantheon Sorbonne et auditeur 65e session IHEDN (Institut des hautes études de la défense nationale. Journaliste depuis 1989, fonde B2 - Bruxelles2 en 2008. Correspondant UE/OTAN à Bruxelles pour Sud-Ouest (auparavant Ouest-France et France-Soir).

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