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Merci Barack !

(BRUXELLES2) Le dernier sommet européen aura vu Français et Allemands réunis dans une initiative commune. Configuration assez rare en matière de politique étrangère pour être signalée et commentée. On avait pris l'habitude, ces derniers mois, de voir les points de vue des Allemands et des Français diverger de façon importante, pour ne pas dire être totalement contraires, et les diplomaties nationales s'employer ensuite à raccommoder ces différences.

Que ce soit sur l'intervention en Libye ou les frappes militaires en Syrie, sur l'embargo sur les armes, les points de crispation étaient nombreux. L'espionnage par la NSA du portable de Angela Merkel, astucieusement rendu public aujourd'hui, comme des écoutes passées en France, rapprochent aujourd'hui les deux alliés. Berlin et Paris peuvent donc dire merci à Barack... Le Royaume-Uni se tenant coi, impliqué dans le dispositif d'écoute américain.

Une même longueur d'ondes

Il y a l'approche politique, démontrée par Angela Merkel, qui vise à une explication de texte avec les Américains. « La confiance est ébranlée. (...) Nous sommes des alliés, mais une telle alliance peut être construite que sur la confiance. L'espionnage entre amis n'est pas possible » Même longueur d'ondes chez François Hollande. « On ne s’espionne pas entre alliés. Au nom même de la relation entre les Européens et les Américains ou entre la France et les Etats-Unis, nous devons tout faire pour que justement la confiance puisse être établie ».

Un enjeu économique

Mais l'enjeu n'est pas seulement politique. Il est économique et démocratique, comme l'a rappelé François Hollande. « La question n’est pas un problème d’information politique. Très franchement, il y a suffisamment d’échanges entre chefs d’Etat pour qu’il n’y ait pas beaucoup de secrets qui demeurent, surtout entre alliés. L’enjeu, il est économique le plus souvent, parce que ces données ont un prix. Et enfin, il est bien sûr sur les libertés, même si l’objectif est la lutte contre le terrorisme et la sécurité. »

La technologie ne suffit pas

Paradoxalement, le président Français souligne que l'autonomie technologique n'est pas nécessaire... « Penser que c’est simplement parce que nous aurions nous-mêmes le contrôle du produit que nous pourrions être protégés d’éventuelles surveillances ou interceptions, ce serait une illusion. Cela suppose, c’est le sens de la démarche que nous engageons, que les services eux-mêmes, aient des règles de conduite. »

Etablir un code de conduite

Ce que veulent les deux pays, c'est « définir un accord de non-espionnage entre les alliés européens » et avec les Etats-Unis. «Assurer la sécurité, faire des contrôles est légitime. Nous sommes dans un monde dangereux, il ne faudrait pas baisser la garde. ». Parmi ces règles de conduite, Fr. Hollande en a tracé trois : « La première règle est qu'on ne surveille et on ne contrôle pas les portables des personnes qu’on rencontre dans des sommets internationaux. (Deuxièmement) on s’informe mutuellement. (Troisièmement) on ne stocke pas certaines informations qui peuvent mettre en cause la liberté.  »

Les conclusions du Conseil

« The Heads of State or Government discussed recent developments concerning possible intelligence issues and the deep concerns that these events have raised among European citizens.
They underlined the close relationship between Europe and the USA and the value of that partnership. They expressed their conviction that the partnership must be based on respect and trust, including as concerns the work and cooperation of secret services.
They stressed that intelligence gathering is a vital element in the fight against terrorism. This applies to relations between European countries as well as to relations with the USA. A lack of trust could prejudice the necessary cooperation in the field of intelligence gathering.
The Heads of State or Government took note of the intention of France and Germany to seek bilateral talks with the USA with the aim of finding before the end of the year an understanding on mutual relations in that field. They noted that other EU countries are welcome to join this initiative.
They also pointed to the existing Working Group between the EU and the USA on the related issue of data protection and called for rapid and constructive progress in that respect. »

Nicolas Gros-Verheyde

Rédacteur en chef du site B2. Diplômé en droit européen de l'université Paris I Pantheon Sorbonne et auditeur 65e session IHEDN (Institut des hautes études de la défense nationale. Journaliste depuis 1989, fonde B2 - Bruxelles2 en 2008. Correspondant UE/OTAN à Bruxelles pour Sud-Ouest (auparavant Ouest-France et France-Soir).

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