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Notre guerre secrète au Mali

Notre guerre secrète au Mali(BRUXELLES2) L'intervention au Mali a, à peine, terminé sa première phase qu'un premier livre lui est consacré. Mes confrères, Isabelle Lasserre et Thierry Oberlé, du Figaro, ont fait vite. Leur livre tient compte des dernières évolutions sur le terrain. Mais cela fait quelques temps qu'ils suivent ces affaires de terrorisme et le Sahel. C'est tout l'intérêt d'ailleurs de cet ouvrage que de ne pas se concentrer uniquement sur l'opération Serval mais aussi de resituer dans un contexte général cette opération : la montée des mouvements extrémistes dans la région, d'abord autour du GSPC en Algérie puis d'AQMI, les révoltes touaregs, l'affaiblissement de l'Etat malien, les différentes menaces qui se croient (narco et terrorisme). Et cela aide à saisir toute l'ampleur du problème. On perçoit aussi combien cette situation du Sahel qui a très tard percé dans l'esprit de nombreux pays européens était, au contraire, très prégnant à Paris.

C'est même le premier sujet important que trouve le nouveau ministre de la Défense, Jean-Yves Le Drian, quand il s'installe aux manettes de l'Hotel de Brienne, le 17 mai 2012, racontent les auteurs. « A l'issue de l'exposé que lui font les patrons du renseignements, le nouveau locataire de la rue Saint Dominique apprend que plusieurs tentatives d'infiltration venant du Sahel ont eu lieu sur le territoire français depuis 2009. Tout de suite, cette menace lui apparait comme très importante, pour la France, bien davantage que celle qui vient d'Iran ou d'Afghanistan. » Menace résumée en une phrase par un "haut responsable militaire" : « Si nous ne nous battons pas aujourd'hui au Sahel, nous devrons nous battre demain à Marseille ». Le sujet sera évoqué avec le chef du Pentagone au sommet de Chicago immédiatement ensuite. Le 29 mai, une note est rédigé au président de la république qui est claire : « le nord du Mali est devenu "un sanctuaire pour al-Qaida". En raison des enjeux sécuritaires, des intérêts stratégiques et de la présence des otages, "le statu quo ne saurait être une option. » Une stratégie en trois volets est approuvée : « organiser une montée en puissance des armées maliennes (FAM) tout en mobilisant la Cedeao, déployer une mission de l'Union européenne pour former les FAM ; enrayer la progression et la sanctuarisation d'AQMI ».  (...)

Deux options s'affrontent alors : « l'une mise sur la montée en puissance des forces africaines et la participation de l'Union européenne à l'opération », l'autre sur une intervention en solo de l'armée française. M« Il apparait clairement dès l'automne 2012 que l'Europe n'est pas à la hauteur des attentes du ministre français de la Défense ? Et que les armées africaines ne pourront pas être prêtes assez rapidement pour intervenir ». Et « la menace était devenue telle qu'on ne pouvait pas ne pas la traiter. La probabilité de sortie de route du premier scénario était si forte qu'il a rapidement fallu basculer sur le plan B », résume un officier général ». Une liste de prétextes qui justifieraient une rapide intervention française (est) établie ». Il n'y en aura pas besoin. Le mouvement des différents groupes vers le sud, et Konna, sonne l'alarme.

La suite dans le livre ...

  • "Notre guerre secrète au Mali, les nouvelles menaces contre la France", Isabelle Lasserre et Thierry Oberlé (Editions Fayard, Collection Documents, mai 2013, 252 pages, 17 €)

Lire aussi : Mali. Une opération préparée de longue date… (questions et réponses)

Nicolas Gros-Verheyde

Rédacteur en chef du site B2. Diplômé en droit européen de l'université Paris I Pantheon Sorbonne et auditeur 65e session IHEDN (Institut des hautes études de la défense nationale. Journaliste depuis 1989, fonde B2 - Bruxelles2 en 2008. Correspondant UE/OTAN à Bruxelles pour Sud-Ouest (auparavant Ouest-France et France-Soir).

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