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Les opérations au Mali. Tordre le coup à quelques confusions (v2)

(BRUXELLES2) On se plait à loisir à confondre les opérations. Ainsi que je le mentionnais récemment, au Mali, il n'y a pas une opération mais bien trois opérations distinctes au Mali (lire : Mali : trois opérations en une publié en début d'année).

1. L'opération européenne EUTM Mali n'est qu'un des pans de cette stratégie internationale pour consolider - ou plutôt reconstruire le Mali.

  • Son action ne situe pas dans le court terme mais plutôt dans le moyen-terme. Son objectif n'est pas de donner une formation "vite fait", de quelques jours à des militaires. Mais bien de reformer, de remettre en état l'armée malienne, de manière fonctionnelle et organisée (ce qui n'était plus le cas jusqu'ici).
  • Elle n'a pas vocation non plus à être exécutive. Il n'y a aura pas de patrouille de soldats en armes dans les rues à Bamako, chargés de sécuriser tel ou tel secteur, comme l'OTAN l'a fait au Kosovo.
  • Les formateurs européens n'ont pas vocation aussi à aller combattre. Il n'y aura pas non plus (normalement) de forces commandos européennes à l'assaut du nord. Ceci est une vue de l'esprit.

2. La récente offensive des mouvements rebelles du nord et la réaction française (accompagnée par quelques pays européens et de l'OTAN) oblige cependant à redessiner le contour de cette opération. Les formations données ne seront plus tout à fait les mêmes. Et le tempo non plus. Lire : la mission EUTM Mali sera plus robuste

3. L'Europe est active. Ce n'est pas parce qu'il n'y a pas aujourd'hui de présence "politique" sur le "front médiatique" que l'Europe n'agit pas sur le Mali. Ce n'est parce qu'elle ne bombarde pas les camps "rebelles" en Somalie ou au Mali que son rôle n'est pas efficace. Soyons clairs ! S'il n'y avait pas l'UE et sa force de frappe financière, l'opération de la MISMA (CEDEAO) au Mali ne se mettra pas en place. Tout simplement car l'Europe paie les forces engagées sur place, comme elle le fait déjà en Somalie pour l'AMISOM ou en Palestine pour la police palestinienne. Et l'opération Serval serait condamnée inexorablement à l'échec car sans porte de sortie. Chacun est ainsi dans son rôle. La France en "avant-garde", les Africains en relais, avec l'Europe en soutien arrière et en relais à moyen-terme (avec EUTM Mali). Il y a une logique complexe mais complète. Comme peut l'être un pack de rugby avec ses avants, ses piliers et ses arrières. Si un des éléments est absent, l'édifice tombe. Ne pas saisir cette donnée, c'est à mon sens faire une erreur stratégique.

Nicolas Gros-Verheyde

Rédacteur en chef du site B2. Diplômé en droit européen de l'université Paris I Pantheon Sorbonne et auditeur 65e session IHEDN (Institut des hautes études de la défense nationale. Journaliste depuis 1989, fonde B2 - Bruxelles2 en 2008. Correspondant UE/OTAN à Bruxelles pour Sud-Ouest (auparavant Ouest-France et France-Soir).

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