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Le fossé avec les Britanniques se creuse (Maj)

(BRUXELLES2) Il y avait eu le report du sommet franco-britannique entre Sarkozy et Cameron, prévu le 2 décembre. Il y a aujourd'hui - avec l'accord intervenu dans la nuit au sommet européen - la volonté franco-allemande d'avancer  dans l'intégration économique.

Le Royaume-Uni dans le corner

Un traité qui n'est pas à 17+ comme on l'a dit élégamment. Mais à 27 -. C'est, en effet, l'opposition résolue du Royaume-Uni qui a été l'élément de fracture. La Suède et la république Tchèque étaient réticents et voulaient consulter au préalable leur Parlement. Et la Hongrie semblait suivre, mais surtout pour des questions d'opportunité politique. Pour les deux pays d'Europe de l'Est, il est probable que cette "sortie" pourrait ne pas survivre plus de quelques années quand ces deux pays voudront frapper à la porte de l'euro ou tout simplement changeront de dirigeant.

(Maj 13h) Le premier hongrois Victor Orban a fait marche arrière ce matin, parlant d'un malentendu. La Hongrie n'est pas contre le Traité dans l'absolu mais doit "consulter le Parlement". « J'avais mandat du Parlement pour deux aspects : résoudre la crise de l'euro à 27 ou s'il n'y avait pas d'accord à 27 laisser l'eurozone régler la question » a-t-il expliqué lors d'une conférence de presse. Or, ici, il s'agit de rejoindre les pays de l'eurozone. Il faut donc en discuter avec le Parlement. Ce sera « électrique » a-t-il promis. Car on touche à la « souveraineté » du pays. Il a tenu cependant à prendre ses distances avec le Royaume-Uni estimant que la Hongrie ne pouvait ranger de son coté. « Les Britanniques ont un opt-out refusent de rejoindre l’eurozone. Nous nous voulons rejoindre l’Euro, ce n’est pas une question de choix, c’est une obligation » a-t-il expliqué.

Un peu dedans, un peu dehors

Pour le Royaume-Uni, il s'agit pour l'instant d'une défaite personnelle pour D. Cameron. Il n'a pas pris pleinement conscience du changement d'état d'esprit parmi les Européens. D'ordinaire, ceux-ci faisaient tout pour garder à bord le Royaume-Uni, quitte à lui octroyer un ou deux opt-out, comme on l'a fait avec les traités précédents (de Maastricht à Lisbonne en passant par Amsterdam). Le Royaume-Uni est ainsi toujours un peu dedans, un peu dehors. L'exclusion du Royaume-Uni du protocole social répondait à un objectif très politique qui n'était pas défavorable aux intérêts britanniques ; de même pour la non-participation à l'accord de Schengen qui répondait à une notion beaucoup plus physique - le Royaume-Uni n'ayant pas de frontières terrestres n'a évidemment pas le même intérêt à partager le contrôle des frontières avec les pays continentaux. Cette fois-ci, les Européens semblaient décidés à passer "par-dessus bord" le Royaume-Uni et à ne pas céder à ses revendications de pouvoir bénéficier sans participer, la tactique britannique habituelle. Pour autant toute difficulté n'est pas résolue, car on touche ici au coeur du système communautaire, l'intégration économique, le fonctionnement institutionnel. Il n'est pas tout à fait évident que le Royaume-Uni ne cherche pas à revenir par la fenêtre, soit en négociant un accord ad hoc d'association, soit tout simplement en contestant cet accord devant la Cour de justice européenne. Les Britanniques ont, aussi, d'excellents juristes...

Texte approuvé au Sommet cette nuit : dans les docs de B2

Les projets "défense" patinent

En défense, on sait bien que les projets actuels patinent, du moins côté industriel. Mis à part la coopération nucléaire qui fait l'objet d'un traité inscrit dans le marbre, et correspond à une vraie convergence d'intérêt (Royaume-Uni et France sont les seuls pays européens à disposer de l'arme de dissuasion nucléaire), les autres projets sont toujours dans les cartons. Outre les difficultés habituelles de la coopération à plusieurs - plus lente à mettre en place qu'un projet en solo -, il y a des facteurs de divergence quasi-politique. Les deux gouvernements n'ont pas la même approche de la politique industrielle européenne de défense. Pour la France, cela passe par la protection de son champion national et éventuellement européen. Pour le Royaume-Uni, cela reste encore un adossement industriel aux industries américaines. En termes juridiques, cela se traduit, pour le premier, par la volonté d'un appel d'offres restreint au marché européen (NB : qui exclut les USA) - comme le permet la directive défense -, pour le second, par la volonté d'un appel d'offres ouvert (NB : aux Usa).

 

Nicolas Gros-Verheyde

Rédacteur en chef du site B2. Diplômé en droit européen de l'université Paris I Pantheon Sorbonne et auditeur 65e session IHEDN (Institut des hautes études de la défense nationale. Journaliste depuis 1989, fonde B2 - Bruxelles2 en 2008. Correspondant UE/OTAN à Bruxelles pour Sud-Ouest (auparavant Ouest-France et France-Soir).

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