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Pooling and sharing ? Qui veut bien rénover ma cabane dans le jardin

(BRUXELLES2, réflexion) En écoutant les différents experts parler de pooling and sharing - comme c'était le cas au séminaire Weimar de juillet à Paris ou à différentes autres occasions -, on a l'impression qu'ils sont peu nombreux les Etats - et les personnes - à avoir pris conscience du changement de paradigme que nous oblige cette nouvelle crise.

Je me souviens d'une petite réunion de debriefing d'un conseil économie, où une très intelligente diplomate expliquait en long et large que la crise était passagère, qu'elle serait stabilisée en 2009 et que les indicateurs remonteraient en 2010 ou 2011. Je lui avait fait part de mon étonnement... Elle avait rigolé. J'ai l'impression que ce phénomène de confiance béate est encore présente en matière de défense. Les Etats sont prêts à coopérer, mais uniquement sur leurs projets.

En gros, c'est comme si je venais vous demander de bien vouloir retaper ma vieille cabane que j'ai dans mon jardin. Et, si possible de me prêter des outils neufs ou en bon état (car les miens sont un peu usagés). Je vous promet de vous les prêter de temps à autre. Or, si vous n'avez pas de jardin... vous n'en avez cure. En matière de pooling and sharing, on est là aujourd'hui. Au lieu de consolider la maison principale, on cherche à rénover ses "cabanes de jardin".

Sans vouloir bâtir une armée commune (trop complexe...), il s'agit de mettre en commun les modules nécessaires à une défense commune : les satellites, les moyens de projection, le soutien médical, la formation... En anticipant les besoins nécessaires dans 5 ou 10 ans, et non pas ce qui était nécessaire aujourd'hui. En ayant une vue globale des besoins, et non pas en recherchant un ou deux "trucs" rapides à mettre en place. En cherchant les moyens d'accélérer cette mise en commun. Car même si les rapprochements sont complexes, et demandent du temps, on ne peut se permettre aujourd'hui de passer 5 ans à bâtir un projet. Les personnes et les équipes compétentes ne manquent pas dans les différents ministères de la défense. On peut, sans griller les étapes, accélérer le mouvement. C'est là une question d'impulsion politique majeure.

Au rythme des coupes budgétaires dans les ministères de défense, il ne restera bientôt que des armées de papier, juste bons à défiler dans les villes européennes en paix, à se faire les supplétifs en cas de menace terroriste ou de catastrophe naturelle... à se faire tailler en pièces en Afghanistan, le seul dernier théâtre d'opérations majeur où les armées européennes sont engagées.

Nicolas Gros-Verheyde

Rédacteur en chef du site B2. Diplômé en droit européen de l'université Paris I Pantheon Sorbonne et auditeur 65e session IHEDN (Institut des hautes études de la défense nationale. Journaliste depuis 1989, fonde B2 - Bruxelles2 en 2008. Correspondant UE/OTAN à Bruxelles pour Sud-Ouest (auparavant Ouest-France et France-Soir).

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