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Alain Juppé à Bruxelles : « je suis venu redonner des couleurs à l’Europe de la Défense »

Crédit : Commission européenne

« Je suis venu ici afficher la détermination française pour redonner des couleurs à l'Europe de la Défense » a affirmé Alain Juppé, hier (jeudi) devant le "Vip Corner" de la Commission européenne à quelques journalistes (dont j'étais) pour rendre compte "vite car j'ai un Thalys à prendre" (celui de 16h37), de sa rencontre avec Cathy Ashton (habillée pour la circonstance d'un tailleur flashy bleu turquoise) et José-Manuel Barroso (plus classique).

Effectivement rendre quelques couleurs à la PeSDC était nécessaire, coté français, où on pouvait avoir quelques doutes, comme coté européen. En tout cas, le ministre y croit et a tenu à le dire haut et fort aux journalistes comme à la Haute représentante. A double titre. « L'Europe de Défense est nécessaire. L'Europe ne peut prétendre à un rôle au niveau international si elle n'est pas en capacité d'assurer sa sécurité de manière autonome. Et c'est aussi une exigence budgétaire. »

Le rôle de l'agence européenne de défense, fondamental

« Se mettre ensemble est très utile » a-t-il affirmé, prenant exemple sur la coopération franco-britannique. « La France ne peut plus se permettre d'avoir deux groupes aéronavals. Ensemble, avec le Royaume-Uni, nous préservons cette capacité. Partager les capacités ne signifie pas automatiquement réduire mais en avoir une efficacité ». Alain Juppé a aussi voulu mettre en avant combien cette coopération était « ouverte » notamment à l'Allemagne, « si elle le souhaitait » et combien elle s'intégrait dans un effort européen plus général notamment en « matière de ce qu'on appelle le pooling et sharing, l'agence européenne de défense a un rôle de premier plan ».

Le Ministre a notamment défendu ce nécessaire exercice économique entamé autour du papier germano-franco-polonais, de Weimar, sur les capacités. Un papier auquel la Haute représentante a répondu par courrier (papier à venir).

Crédit : Commission européenne

Cathy Ashton disponible si les Etats membres le veulent bien

Le ministre a donné aussi son sentiment sur position de Cathy Ashton sur la PeSDC. « Je sais que certains sont sceptiques » m'a-t-il répondu. Mais je peux vous assurer que Cathy Ashton m'a semblé « parfaitement convaincue ». Et de préciser : « Cathy Ashton m'a assuré qu'il appartient au gouvernement de prendre des initiatives mais qu'elle assurait une grande disponibilité d'assurer le suivi de ces initiatives ». Une très bonne définition, à mon sens, de la position de Cathy Ashton sur la politique européenne de défense. Pas d'initiative propre mais suivi des initiatives propres des Etats membres si ceux-ci le veulent vraiment. Nous sommes loin, des ambitions et du texte du Traité de Lisbonne... Mais c'est la Realpolitik européenne du moment !

On temporise sur la Côte d'Ivoire, on appuie sur le Sahel

La question des crises dans le monde a également été abordée. Concernant la Côte d'Ivoire, le ministre a répété la position française : « Il y a un seul président légitime, Alassane Ouattara. Et nous soutenons le renforcement des sanctions, financières ». Il a fermé l'hypothèse d'une possible action coordonnée européenne pour soutenir les Nations-Unies qui avaient appelé les Européens à l'aide, appel relayé par la ministre des Affaires étrangères Alliot-Marie, avec qui décidément le courant ne semble pas passer. « Il n'y a pas d'action militaire prévue ».

Sur le Sahel, il a été plus prolixe, estimant que la menace ne concernait pas uniquement la France. C'est l'Europe qui est toute entière concernée. Nous avons là une zone avec de multiples trafics de toutes sortes (drogues...). Et nous avons tout intérêt à conjuguer nos efforts. C'est un sujet que j'ai abordé notamment avec JM Barroso a-t-il affirmé. « Nous avons un volet formation, notamment des forces de sécurité, et un volet développement »

Un sommet européen consacré à la Défense

Pour souligner l'importance de ce sujet, Alain Juppé a aussi estimé que les chefs d'Etat et de gouvernement devaient se pencher « sur ces questions de l'Europe de la Défense à l'occasion d'un sommet européen ». La France est ainsi le troisième pays après l'Italie et la Grèce à s'exprimer publiquement en faveur d'une mise à l'ordre du jour de cette thématique.

Nicolas Gros-Verheyde

Rédacteur en chef du site B2. Diplômé en droit européen de l'université Paris I Pantheon Sorbonne et auditeur 65e session IHEDN (Institut des hautes études de la défense nationale. Journaliste depuis 1989, fonde B2 - Bruxelles2 en 2008. Correspondant UE/OTAN à Bruxelles pour Sud-Ouest (auparavant Ouest-France et France-Soir).

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