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Comme un “sentiment d’optimisme” sur Tripoli

(BRUXELLES2) Agostino Miozzo, le directeur du département gestion de crises du service diplomatique européen, affichait son optimisme hier, quand il est venu devant la presse, au retour de sa mission de Libye. Les « changements sont rapides. Nous sommes arrivés le 31. Il y avait encore des tirs de snipers. Et le lendemain, le 1er septembre, la situation était quasiment calme, avec des enfants et des femmes dans la rue, et le sentiment d’un retour à la normalité. » Impression confirmée le lundi, à la fin du Ramadan. « Les gens retournaient à leur travail, les boutiques rouvraient. »

Un SMS du CNT et la victoire au football

Certains avaient recu un SMS du CNT : retournez au travail, la vie doit reprendre, revenir à la normale ». Signe supplémentaire : le « trafic automobile avait repris, aussi cahotique qu’habituellement dans Tripoli. » Quant à l’aéroport international, il pourrait être rouvert dans une dizaine de  jours ou deux semaines ; l’aéroport militaire étant, lui, déjà ouvert. Et quand la Libye a gagné le match de football (dans le cadre du premier tour de la coupe africaine des nations), « c'était la folie. Tout le monde était dans la rue, criant sa joie, avec des tirs en l'air de partout ».

Le drapeau européen : un gage de normalité

« Le but de notre mission est d’affirmer notre présence, d'avoir des premières relations avec le gouvernement. » Le fait que le drapeau européen hissé sur l'hotel qui abrite le bureau provisoire de l'Union européenne à Tripoli a eu un « impact extraordinaire sur les politiciens, les personnalités, la population » a-t-il expliqué. Ali Targhani, le vice Premier ministre du CNT chargé des Finances et du Pétrole, « un des hommes clés pour demain », avec qui la délégation a pu s'entretenir « nous a dit toute l’importance de ce drapeau. Car c'est vu comme gage de retour à la normalité pour la population libyenne.

Des dirigeants "sincères"

Agostino Miozzo est aussi optimiste sur ceux qui dirigent actuellement la Libye : « Si ces gens deviennent les dirigeants de demain, nous sommes en de bonnes mains. Ils sont sincères, ouverts, fiers de leur pays. » Mais avertit-il, ce sera la réconciliation et la continuité des activités qui sera la « clé » pour l'avenir. La situation reste marquée par une certaine « fragilité ».

Le conseil du CNT : éviter un nouvel Irak et Afghanistan

Les représentants du CNT ont expliqué aux Européens « d'éviter les missions d’évaluation qui se succèdent sans lendemain. Ils veulent une coordination des efforts internationaux ». Ils ne veulent pas recommencer les « erreurs commises en Afghanistan ou en Irak » explique un expert européen du dossier. Il faut éviter le « circus international,  où tout le monde vient, chacun apportant sa solution, et qui entraîne autant le chaos. Un circus qui n’est pas seulement le fait des organisations humanitaire, mais aussi d'organisations de sécurité, économiques… »

Les urgences

Dans l'immédiat le grand défi est la « reprise de la chaîne de distribution et de ravitaillement », impérative notamment pour les hôpitaux. A moyen terme, ce sera de récupérer les armes en circulation. « Ce n'est pas un travail facile. Nous ne savons pas qui a des Kalatchnikov. Mais ensuite nous aurons une armée régulière, une police civile, et ils seront embauchés ». Parmi les priorités du gouvernement provisoire de Libye sur lesquels les Européens se montrent prêts à apporter le soutien, il y a : « le secteur de la sécurité (les frontières, la police civile, et éventuellement défense), l'approvisionnement en eau, le soutien à la société civile, les femmes, les droits de l’homme ». Mais explique Agostino Miozzo, c'est avant tout aux Libyens de définir ce qu'ils veulent.

Une deuxième mission rapidement

Une deuxième équipe devrait partir « dans quelques jours » pour renforcer la première équipe sur place. Ce sera, d'après nos informations, une équipe interservices composée tant de diplomates ou d'experts du SEAE que d'agents de la Commission européenne. Une dizaine de personnes en tout. En revanche, l'ouverture de la délégation de l'UE - en tant que telle - ne pourra pas se produire avant plusieurs semaines, voire des mois » nous a affirmé un interlocuteur.

Nicolas Gros-Verheyde

Rédacteur en chef du site B2. Diplômé en droit européen de l'université Paris I Pantheon Sorbonne et auditeur 65e session IHEDN (Institut des hautes études de la défense nationale. Journaliste depuis 1989, fonde B2 - Bruxelles2 en 2008. Correspondant UE/OTAN à Bruxelles pour Sud-Ouest (auparavant Ouest-France et France-Soir).

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