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Militaires français en Afghanistan : il est temps de rentrer, dit le PS français

(BRUXELLES2) Après avoir longtemps hésité, le parti socialiste vient de franchir un pas très net sur l'engagement français en Afghanistan estimant l'heure du retrait venue. "Le Parti socialiste estime que la France doit réviser sa politique en Afghanistan. La présence militaire de la France n’est plus justifiée dans ce pays." écrit ainsi Jean-Christophe Cambadélis, secrétaire à l'International du Parti. Et d'argumenter à partir des faits récents "La situation politique, militaire et sécuritaire ne cesse de se dégrader en Afghanistan. Un soldat français a été tué aujourd’hui et neuf autres soldats ont été blessés. Cela porte le nombre de nos soldats morts en Afghanistan à une cinquantaine à ce jour. Huit soldats de l’OTAN ont été tués ce week-end dans des attentats commis parfois par des membres des forces armées afghanes. (...) Sur le plan politique, rien ne démontre la volonté et la capacité du gouvernement de Kaboul à lutter efficacement contre la corruption et assurer la sécurité de la population. Il est d’ailleurs engagé dans des négociations avec les talibans contre lesquels les forces de l’OTAN sont en guerre depuis plus de dix ans."

Un sujet pour la prochaine présidentielle

Le PS a donc bien pris son temps pour s'exprimer. Certaines personnalités du PS étaient critiques depuis longtemps sur cet engagement en Afghanistan qui dure depuis dix ans, tel Paul Quilès, ancien ministre de la Défense de F. Mitterrand (1985-1986) qui réclamait, il y a un an déjà, le retrait du contingent français. Il nous avait aussi confié combien il était exaspéré par l'absence de débat en Europe, en France (lire : Paul Quilès : il faut ouvrir le débat en Europe sur la présence en Afghanistan). C'est maintenant chose faite, au moins pour la France.

A un an des présidentielles, le retrait d'Afghanistan va entrer, de gré ou de force, dans la campagne électorale. Et tous les partis devront se positionner sur un sujet qui n'est pas très populaire. Les forces de la coalition ont, en effet, prévu d'enclencher une phase de retrait militaire qui commencerait après l'été 2011 pour terminer à l'horizon 2014. Mais le calendrier reste encore très flou (lire : Les forces afghanes vont prendre le relais de l’OTAN dans sept zones).

Une fracture idéologique européenne

On peut souligner que l'on s'achemine lentement vers une fracture idéologique en Europe. Le Parti socialiste français rejoint en effet plusieurs de ses homologues européens (néerlandais, tchèque, belge, finlandais, allemand...) qui ont déjà pris position ou s'interrogent très ouvertement sur la continuité de la présence en Afghanistan. Même, au Royaume-Uni, le débat se corse. Les travaillistes commencent, assez timidement cependant, à s'interroger publiquement sur la nécessité de passer à une autre phase. "C'est la fin du jeu" proclame ainsi, dans le New York Times, l'ancien ministre des Affaires étrangères, David Miliband. Il faut "négocier avec les Talibans", l'ONU doit "nommer un médiateur (musulman) dans ce but". On doit passer d'une phase militaire par l'OTAN à une phase politique sous contrôle de l'ONU. Sinon la date ultime de retrait, 2014, risque "d'être illusoire".

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Nicolas Gros-Verheyde

Rédacteur en chef du site B2. Diplômé en droit européen de l'université Paris I Pantheon Sorbonne et auditeur 65e session IHEDN (Institut des hautes études de la défense nationale. Journaliste depuis 1989, fonde B2 - Bruxelles2 en 2008. Correspondant UE/OTAN à Bruxelles pour Sud-Ouest (auparavant Ouest-France et France-Soir).

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