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Un Italian Doctor au service diplomatique pour la réponse de crises ?

Miozzo lors de l'organisation des secours pour le Tsunami, 2004 (crédit : protection civile italienne)

(exclusif) Cathy Ashton l'a rencontré à Haïti lors des opérations de secours après le tremblement de terre. Et elle a apprécié son travail, au point de lui demander de venir travailler avec elle. Agostino Miozzo, pourrait ainsi être nommé dans les prochains jours, pour « coordonner la réponse de crises au service diplomatique de l'UE », un poste nouvellement créé et emblématique. Ce sera ainsi le premier Italien nommé à un poste principal du service (1).

Un expert de la gestion des secours de catastrophes

Directeur de l'Office des relations internationales et des volontaires de la Protection civile italienne (la direction VI) depuis 2002, Agostino Miozzo a été sur tous les "fronts". Il a ainsi coordonné les secours après le Tsunami en 2004, au Sud Soudan, en Iran (après le tremblement de terre de Bam), en Indonésie, au Maroc, en Algérie (tremblement de terre encore 2003), en Ossétie (après la tragédie de Beslan), aux Etats-Unis (après la tornade Katrina sur la Nouvelle Orléans)... Mais ce n'est pas seule expérience.

Un "Italian doctor" *

Né le 30 septembre 1953, à Camposampiero, "l'Italian Doctor" a fait l'essentiel de sa carrière pour le compte de la Farnesina, le ministère des Affaires étrangères italien, en parcourant le monde. Diplômé de médecine de l'Université de Milan (en 1980), comme médecin volontaire au Zimbabwe de 1982 à 1984, puis coordinateur du programme d'urgence du ministère des Affaires étrangères en Ethiopie, en 1984 - 1985 (c'est l'époque de la grande famine et du "Band aid" lancé par Bob Geldof). Ensuite, il est consultant pour les activités internationales de l'Institut supérieur de la santé, et l'hopital "Bambino Gesù" de Rome (de 1985 à 1999), et responsable du programme de coopération sanitaire et sociale pour l'Afrique sub-saharienne et la Méditerranée au ministère (1985-1991).

En 1991, il prend la tête, durant dix ans, jusqu'à 2001, de la coordination des opérations de secours d'urgence à la DG Coopération au développement italien. Il gère ainsi les situations de conflit entre l'Ethiopie et l'Erythrée, en Yougoslavie, en Irak, en Afghanistan, au Rwanda... Les carnages ne manquent pas dans cette décennie. Il intervient aussi après l'ouragan Mitch en Amérique centrale, et pour d'autres catastrophes (tremblement de terre en Algérie en 1999), Corée du Nord, Russie, Brésil... Durant un intermède (1995-1996), il prend un poste à la Croix-Rouge italienne comme responsable de l'unité de crises.

Un nouveau poste emblématique

Ce poste de "coordinateur de la réponse de crises" au sein des Relations extérieures est entièrement nouveau. Il reste encore à définir. Il ne s'agit pas, en effet, de coordonner les différentes structures de gestion de crises de l'Europe de la défense (Etat-major civil ou militaire, CMPD...). Il ne s'agit pas non plus de refaire le travail que font les deux unités (future direction de la Protection civile) de la Commission européenne, sous la direction de la commissaire Georgieva. Il s'agit d'être à la jonction du diplomatique, du militaire et du civil pour que l'UE soit plus efficace. La fonction de coordination sera particulièrement active quand il s'agira d'agir en dehors de l'UE avec d'autres moyens stricto sensu que ceux de la protection civile. Son rôle devrait être multiple : conseiller la Haute représentante, et lui apporter son expertise, en matière de protection civile et de secours de catastrophes dans le monde, ainsi que ses contacts (nombreux) au niveau européen comme international dans le milieu des secours de catastrophes. Mais pas seulement. De par ses fonctions, Miozzo a pu tissé certaines bonnes relations avec des responsables de pays dits "difficiles" (Iran, Lybie, Palestine...). Ce qui pourrait être précieux. L'action de "secours de catastrophes" est aussi, et souvent, un moyen d'action diplomatique... pur (2).

Cette nomination - si elle est confirmée - serait assez logique. D'un point de vue politique, elle constituerait un message clair de l'intention de Cathy Ashton de faire de la coordination européenne des secours de catastrophes, un dossier prioritaire. L'Italie a toujours été (avec la France) un des pays qui a le plus porté ce dossier au niveau européen. Elle dispose d'une force de protection civile efficace qui s'est déployée, à de nombreuses reprises, très rapidement sur le terrain. Et la nomination d'un de ses nationaux à ce poste constitue un gage d'ambition pour le futur.

(1) Lire : Le nouveau directeur de l’agence européenne de défense sera-t-il « Une » ?…

(2) Lire : La sécurité civile, la pièce manquante à l’UE – Puissance civile

(*) Italian doctor fait référence à la génération des french doctors, de Bernard Kouchner et consorts, qui ont entrainé la création de médecins sans frontières, médecins du monde et autres organisations de secours d'urgence "interventionnistes".

Nicolas Gros-Verheyde

Rédacteur en chef du site B2. Diplômé en droit européen de l'université Paris I Pantheon Sorbonne et auditeur 65e session IHEDN (Institut des hautes études de la défense nationale. Journaliste depuis 1989, fonde B2 - Bruxelles2 en 2008. Correspondant UE/OTAN à Bruxelles pour Sud-Ouest (auparavant Ouest-France et France-Soir).

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