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Rencontre Tadic-Ashton: la Serbie évolue sur le Kosovo et gagne un galon européen

Boris Tadic et Cathy Ashton (Crédit : Commission européenne)

(BRUXELLES2) A l'issue d'une rencontre avec la Haute représentante de l'UE, Cathy Ashton, le Premier ministre serbe Boris Tadic semble avoir accepté de revoir sensiblement sa positions sur la résolution que son pays a soumis à l'Assemblée générale de l'ONU (le vote doit avoir lieu jeudi) sur le statut du Kosovo et la récente décision de la Cour internationale de Justice. Si coté européen, on reste très discret, promettant une déclaration mercredi, à Belgrade, on est plus prolixe.

D'après le quotidien Blic, l'UE aurait mis sur la table  un "dialogue sur le statut spécial du nord Kosovo et des enclaves dans le sud" et "l'accélération" du processus d'intégration européenne. En échange, le gouvernement de Belgrade retirerait de son projet de déclaration la plupart des mots qui fâchent :  la "sécession unilatérale n'est pas une voie acceptable pour le règlement des problèmes" a été oubliée, la "discussion sur toutes les questions ouvertes" a été remplacée par un "dialogue" plus consensuel et il n'y a plus mention de la perspective européenne future pour "la Serbie et le Kosovo", ce qui sous-entendait que les deux dossiers étaient intrinsèquement liés. Le tout se termine par un appel au dialogue entre "Belgrade et Pristina".

Un accord gagnant pour toutes les parties

Cet accord a de multiples avantages pour tout le monde. Pour la Serbie, cela lui évite de devoir formellement reconnaître le Kosovo, de subir une défaite politique en retirant sa résolution ou en obtenant un vote défavorable à l'Assemblée générale. Pour l'Union européenne, cela lui évite d'arriver divisée à l'ONU. En l'état, cette résolution pourrait, en effet, être votée par les pays de l'Union européenne : les 22 ayant reconnu le Kosovo comme les 5 qui ne l'ont pas fait, le dernier à s'être rallié au compromis étant Chypre. Cela permet de régler la question des Balkans sur le continent sans devoir faire appel à l'international, de "plier le linge" en famille, pourrait-on dire. Et, au final, cet accord pourrait ouvrir définitivement la voie à l'adhésion pour la Serbie comme pour les républiques voisines des Balkans occidentaux. Au passage, il permet à la Haute représentante, Cathy Ashton, d'afficher le premier succès de sa "diplomatie tranquille", alors qu'elle reste critiquée pour son absence sur le dossier du Moyen-Orient, son manque de vigueur sur les droits de l'homme en Iran et son manque d'appétence pour la gestion de crises ou l'Europe de la défense.

Le processus d'adhésion enclenché

Sur le processus d'adhésion de la Serbie à l'Union européenne, les Britanniques auraient, en effet, promis aux Serbes que d'ici la fin de l'année, la candidature de la Serbie pourrait être confiée à la Commission européenne pour avis, "si des progrès étaient faits sur le Kosovo". Tandis que le ministre allemand des Affaires étrangères, Guido Westerwelle, avait il y a quelques jours à Belgrade, affirmé que les ministres des 27 se pencheraient sur la question au plus tôt en novembre, à condition que la Serbie n'entre pas en conflit avec les 27 sur le Kosovo.

La Serbie pourrait ainsi rattraper à grandes enjambées son frère jumeau et ancien rival, la Croatie dont le processus d'adhésion entamé en 2005 est bien avancé voire quasiment terminé. Et elle pourrait dépasser sur le fil la république de Macédoine (pardon... Fyrom comme ex-république yougoslave de Macédoine) qui a aussi vu sa candidature reconnue en 2005 mais dont les négociations sont bloquées par les pays européens, faute de règlement du litige portant sur son nom avec la Grèce.

Si cette décision venait à être confirmée, elle signifierait un pas important dans la résolution du conflit dans les Balkans à une date quasi-anniversaire. Il y a 20 ans, en effet, le 7 septembre 1990, le Kosovo proclamait, en effet, sa Constitution comme 7e république de la Yougoslavie. Quelques jours plus tard, le 28 septembre, le statut d'autonomie de la province était aboli. 10 ans plus tard, le 24 septembre 2000, Milosevic quittait le pouvoir battu par un autre nationaliste plus présentable, Vojislav Kostunica.

(Nicolas Gros-Verheyde)

Nicolas Gros-Verheyde

Rédacteur en chef du site B2. Diplômé en droit européen de l'université Paris I Pantheon Sorbonne et auditeur 65e session IHEDN (Institut des hautes études de la défense nationale. Journaliste depuis 1989, fonde B2 - Bruxelles2 en 2008. Correspondant UE/OTAN à Bruxelles pour Sud-Ouest (auparavant Ouest-France et France-Soir).

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