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Communication de crises : après le vide, le surplus

(BRUXELLES2 / humeur) Le tremblement de terre au Chili a suscité une vague de communiqués sans précédent, venant de la Commission européenne. Chacun y est allé de sa petite déclaration disant en général à peu près la même chose : d'abord la commissaire à l'Aide humanitaire, Kristalina Georgieva, ensuite de la Haute représentante Catherine Ashton, qui raconte sa conversation avec la ministre des Affaires étrangères du Chili — "I underlined that I was very impressed with the professional way in which the Chilean authorities are handling the situation." (!) —, puis le président de la Commission qui confie son émotion et ajoute "j'ai demandé de débloquer une somme de 3 millions d'euros". Etc... Ce sans compter les réactions des autres instances européennes.

Une certaine impression de désordre...

On a l'impression que le "marquage" à la culotte entre commissaires devient la règle au Berlaymont, le siège de la Commission. Et que Catherine Ashton court après son ombre. On lui reprochait de ne pas être en Haïti, elle se justifie avec une argumentation recevable, puis s'y rend aujourd'hui alors que la commissaire K. Georgieva est sur place (cf. calendrier officiel). La semaine dernière, elle était en Ukraine, prenant la place du commissaire Füle (chargé de la politique du voisinage) mais "brosse" le conseil informel des Ministres de la défense (où aucun autre commissaire ne peut la remplacer, suscitant au passage de vives réactions qui ne seront pas faciles à relever).

Pour un armistice entre commissaires...

Certes, le Traité de Lisbonne a bousculé les habitudes, en instaurant de nouvelles fonctions et institutions au sein de l'Union européenne. Mais ce n'est vraiment pas une surprise, cela fait des années qu'il est sur la table (le dispositif reprenant celui du Traité constitutionnel). Et la plupart des responsables au pouvoir à Bruxelles en ont suivi le développement. De plus, autant, on peut légitimement se poser des questions sur le rôle du président du Conseil européen, dont les fonctions ne sont que peu détaillées par le Traité ; autant, pour les fonctions des commissaires et de la Haute représentante, elles sont cadrées. Le président Barroso, la vice-présidente Ashton et les commissaires devraient trouver facilement un modus vivendi qui évite les duplications et fasse cesser la petite gue-guerre de la présence médiatique nocive.

Revenir aux fondamentaux...

Le Traité de Lisbonne n'a, en effet, pas enlevé toute compétence externe aux commissaires. Quand il y a un désastre d'ordre humanitaire, la commissaire qui occupe cette fonction. Quand il s'agit d'un pays de la politique du voisinage, le commissaire à cet effet. Quand il s'agit de questions plus diplomatiques, globales ou touchant à la politique de sécurité, la Haute représentante. Etc... Et ce n'est pas "l'arrivée" du Haut représentant à la Commission européenne qui doit bousculer toutes les fonctions ni conduire à ce que la Haute représentante s'occupe... de tout et soit partout. Catherine Ashton devrait pouvoir concentrer son action sur les sujets dont elle a le "monopole".

(Nicolas Gros-Verheyde)

Nicolas Gros-Verheyde

Rédacteur en chef du site B2. Diplômé en droit européen de l'université Paris I Pantheon Sorbonne et auditeur 65e session IHEDN (Institut des hautes études de la défense nationale. Journaliste depuis 1989, fonde B2 - Bruxelles2 en 2008. Correspondant UE/OTAN à Bruxelles pour Sud-Ouest (auparavant Ouest-France et France-Soir).

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