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Eusec Somalia : 14 millions d’euros. Et l’OHQ à Nairobi ?

(BRUXELLES2) L'opération d'assistance à la formation des soldats somaliens (Eutrain ou Eusecfor) est relativement simple à monter, de l'avis des spécialistes militaires chargés du dossier. Mais, encore faut-il que des choix soient faits, rapidement, afin de pouvoir poursuivre la planification.

Une approbation de principe qui reste à préciser. En fait, l’approbation par les 27 Ministres des Affaires étrangères et de la Défense,
mardi, du concept de gestion de crises a surtout été un geste symbolique. Un feu vert politique de principe. Beaucoup de choses sont encore à écrire. Et, m'ont assuré des experts du dossier, « des choix restent à faire » « pour avoir un vrai concept stratégique ». Si ces choix sont faits - « cela pourrait être fait dans les jours qui viennent » affirment plusieurs sources concordantes, tant à l'UE que dans certains Etats membres - « l’action commune pourrait ensuite être adoptée dans la foulée, d’ici la fin décembre ». Le chef d’opération sera alors nommé (un général Espagnol puisque l'Espagne a accepté le rôle de nation-cadre). Et la définition du Concept d'opération comme du plan d'opération pourront être finalisées. L’opération serait alors lancée, vraisemblablement, au printemps (sous présidence espagnole). Sauf si un caillou politique se met sur la route (article à suivre), l'UE est, en tout cas, bien décidée à accélérer l'opération. Et les partenaires africains
l'attendent.

Un montage ad hoc. Le montage de la chaîne de commandement pourrait être assez original pour une opération militaire et plus proche de ce qui se fait pour les missions civiles. La relative simplicité opérationnelle de la mission ne nécessite pas, en effet, de mettre en place tout le dispositif habituel des opérations militaires, lourd et inadéquat, pour ce type de mission (OHQ, FHQ...). Il n’y a, en effet, pas de déploiement opérationnel, ni de check point ni de patrouilles. En Ouganda, la menace militaire est limitée et le risque s'il n'est pas nul est faible. Ensuite, si certaines questions logistiques peuvent se poser, elles ne sont pas de l’ordre de celles posées au Tchad.

Une chaîne de commandement ramassée
. Parmi les solutions existantes, on peut activer un des 5 OHQ existant au plan national (Paris, Rome, Postdam, Northwood, Larissa). Solution qui semble difficile : « Cela coûterait plus cher, prendrait du temps et serait un peu démesuré par rapport à la conduite de la mission » explique un officier. La seule solution, peu couteuse et rapide, serait d’adjoindre l’OHQ à Northwood. « Cela aurait une logique dans la continuité de l’opération Atalanta. » Mais les deux opérations sont en fait très différentes. Et Northwood paraît bien loin du terrain. Une autre solution est d’activer l’OHQ de l’État-Major. « Cela aurait une logique si on veut permettre d’assurer le lien avec la Commission européenne », et conforter l’approche globale, « elle a l'avantage de pouvoir être mise en place rapidement - quelques officiers de plus à l'Etat-Major, et elle n’est peu chère ». Mais... On sait que cette solution se heurte toujours à un veto politique de plusieurs Etats membres (Royaume-Uni en tête). La dernière solution envisagée n’existe pas dans les concepts existants mais elle a pour l'instant la faveur des responsables européens. Ce serait une solution ad hoc. Il n’y aurait qu’un chef de mission (et non pas un commandant d’opération et un commandant de force). Il pourrait être basé soit sur place en Ouganda, soit plutôt à Nairobi – près de l’Union africaine, et du commandement de l'Amisom, ce qui serait très logique -, quitte à faire des déplacements à Bruxelles ou vers le centre de formation en Ouganda. Quant au noyau de commandement nécessaire, il serait lui aussi, assez ramassé, d’une vingtaine de
personnes.

Une formation en tandem avec l'Amisom.La coopération avec l’AMISOM doit encore être affinée. Mais l’idée serait d’impliquer les Africains, en leur confiant soit certains modules de formation (ce qui serait le plus facile), soit de les associer aux modules existants.

Une coopération "logistique" avec les Américains. Les Etats-Unis pourraient non pas être associé comme un pays tiers mais coopérer étroitement avec l'opération. Les Américains sont, en effet, déjà présents en Ouganda, Ils ont « déjà assuré des formations (NB : plus ou moins directement et officiellement), ils peuvent fournir des équipements, des armes, et également des moyens logistiques aériens pour amener les Somaliens en Ouganda ou les ramener sur le terrain. » m’a ainsi expliqué un diplomate européen. Pour les Européens, cette coopération est importante non seulement en termes logistiques — elle permet d'aller plus vite dans la planification — mais « c'est aussi, et surtout, un geste politique. Après les Russes au Tchad, les Américains en Ouganda. »

Un coût modique. L’opération devrait coûter environ 14 millions d’euros (à rapporter aux 3 millions qu’a coûtés l’opération française à Djibouti). Ce qui est on ne peut plus modique (l'opération en mer coûte un million d'euros par jour en moyenne). Elle aurait une durée d’un an.

Nicolas Gros-Verheyde

Rédacteur en chef du site B2. Diplômé en droit européen de l'université Paris I Pantheon Sorbonne et auditeur 65e session IHEDN (Institut des hautes études de la défense nationale. Journaliste depuis 1989, fonde B2 - Bruxelles2 en 2008. Correspondant UE/OTAN à Bruxelles pour Sud-Ouest (auparavant Ouest-France et France-Soir).

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