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L’armée belge priée de se serrer la ceinture. La spécialisation seule solution ?

(BRUXELLES2) 97 millions d'euros supplémentaires à trouver pour l'année 2010, à ajouter aux 127 millions d'euros déjà prévues par les prévisions pluriannuelles d'économie, le nouveau chef d'Etat major de l'armée belge, Delcourt, a de quoi passer quelques nuits blanches. 97 millions c'est davantage que l'ensemble des opérations extérieures (qui se montent à 82 millions d'euros, environ*). Le gouvernement fédéral belge est, en effet, confronté (comme quasiment tous les gouvernements européens) à une baisse drastique de ses recettes. Et chaque ministère a été prié de faire des économies (**).

L'armée est destinée à fondre. Le chef d'Etat major avait d'ailleurs confié dans une réunion avec les syndicats, en juillet, qu'il était prêt à dire "non" à toute nouvelle mission internationale sans moyen nouveau. Des restructurations sont à prévoir. Un plan de baisse des effectifs est déjà engagés. De 38.000 personnes aujourd'hui (dont 2000 civils), celle-ci devait encore fondre, passant à 34.000 personnes en 2013, 30.000 en 2015 (contre 44.000 en 1994, soit une baisse d'un quart des effectifs). Et presque la moitié des bases vont être fermées. Avec des
regroupements à prévoir. Ce qui va engendrer des difficultés dans l'armée et des mouvements de grogne à prévoir.

Autre enjeu : les équipements et investissements. La situation d'équipement des troupes n'est pas au top. En Afghanistan, raconte un syndicaliste de la FGTB, les gilets pare-balles sont en nombre limités. Résultat, chacun avant de sortir est obligé d'en emprunter. La participation au programme A400M, aux programmes européens comme Musis ... pourrait-elle être revue ? Enfin, coté opérations extérieures, chaque mission va être examinée de près. La perspective de renfort à l'IFAS, envisagée un moment par le gouvernement, s'éloigne ; de même que la prise de commandement de l'opération Atalanta (qui aurait nécessité un engagement plus important).

Spécialisation à venir. Cette restructuration profonde n'est pas isolée en Europe. La crise économique, et budgétaire, oblige à des choix douloureux et accélère les restructurations. De fait, surtout les armées des petits et moyens Etats membres n'ont plus vraiment le choix : maintenir un nombre important de personnel sous les armes, de nombreuses bases militaires et une certaine palette d'équipements coûte relativement chère. Et l'efficacité de cette armée demeure limitée (car le montant consacré en volume) reste limité. Deux solutions existent alors : le pooling (la mise en commun d'équipement), délicat et difficile à mettre en place, ou la spécialisation. C'est un des travaux menés sous l'égide de l'Agence européenne de la Défense: repérer les meilleures spécialités existant dans les armées européennes. L'armée belge a ainsi deux spécialités à son actif - le déminage et le service de santé - qui pourraient être développées au profit des autres armées (européennes) et seraient sans doute utiles dans les opérations internationales.

(*) La Cour des comptes a un jugement particulièrement sévère, ce depuis plusieurs années, sur la comptabilisation des dépenses  consacrées aux opérations extérieures "réparties de manière peu transparente sur plusieurs programmes budgétaires" et sur le fait de n'avoir "aucune information précise sur le coût de revient par opération ni sur le financement des dépenses".

(**) Le budget fédéral est de 51 milliards d'euros, dont 2,8 milliards d'euros pour la Défense. Ce budget est relativement faible car une bonne partie des activités publiques en Belgique est assumée par les 3 régions (économie, transport...) ou les 3 communautés (éducation, culture...)

Nicolas Gros-Verheyde

Rédacteur en chef du site B2. Diplômé en droit européen de l'université Paris I Pantheon Sorbonne et auditeur 65e session IHEDN (Institut des hautes études de la défense nationale. Journaliste depuis 1989, fonde B2 - Bruxelles2 en 2008. Correspondant UE/OTAN à Bruxelles pour Sud-Ouest (auparavant Ouest-France et France-Soir).

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