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Il faut un QG européen d’opérations dit H.Morin, reste à convaincre les Britanniques

(BRUXELLES2) S'exprimant lors d'un colloque organisé par la Fondation Robert Schuman, à Paris, jeudi, le ministre français de la Défense, Hervé Morin n'a pas hésité à mettre les pieds dans le plat. Il s'est prononcé pour un renforcement de l'Europe de la défense, Quartier-général d'opérations européen, un vrai Conseil des Ministres de la Défense et l'emploi des militaires (quand c'est nécessaire). « Seule la  construction d’une Europe politique, dotée de tous les attributs de la puissance, et en premier lieu d’une politique européenne de sécurité et de défense crédible, peut permettre à notre continent de continuer à peser sur les affaires du monde. » a-t-il expliqué.

Ces propos peuvent paraître des évidences mais... à quelques jours du vote irlandais sur la ratification du Traité de Lisbonne, alors que chacun sait que la politique de défense a été une question controversée lors de la précédente campagne, s'avancer nettement vers une consolidation de l'Europe de la défense, et en particulier de son volet militaire, est un acte dont peu d'hommes publics prennent le pari. La consigne donnée à Bruxelles à tous les responsables, diplomates et militaires, du plus haut niveau au plus bas de l'échelle, est en effet : « Pas de déclarations, pas un mot jusqu'au 2 octobre, pas de vagues ». Rien qui puisse influencer le vote des Irlandais ou être utilisé dans la campagne électorale. "Tous les travaux sur la préparation et la mise en place des futures institutions du Traité de Lisbonne sont d'ailleurs stoppés", du moins officiellement. « On ne peut bien sûr pas empêcher des personnes de discuter mais cela relève davantage du café de commerce » explique un expert européen. Cela n'empêche pas effectivement quelques réflexions sur le service d'action extérieure (j'y reviendrais).

De ce discours, j'ai retenu trois éléments.

Les soldats existent : il faut les employer. « Avec le Corps européen, l’Eurofor ou plus récemment les groupements tactiques de 1500 hommes, nous avons créé des Etats-majors de forces européens, des forces multinationales. Il n’est pas acceptable que ces forces armées  formées, équipées, entraînées, financées, constituées d’officiers et de soldats motivés, restent le plus souvent l’arme au pied dans leur caserne. »

Un QG d'opération européen est nécessaire.
« Pour commander les opérations de l’Union, je reste persuadé qu’une capacité européenne de planification et de commandement des opérations reste nécessaire. Comment voulez-vous pouvoir réagir rapidement s’il faut construire de toutes pièces, à chaque opération, un état-major européen ? Pour le démonter sitôt l’opération achevée ! La mise en place de cette capacité a longtemps été hypothéquée par les craintes liées à a position française au sein de l’OTAN. Ce débat est désormais derrière  nous. Les Américains n’y sont plus opposés.  Tout le monde est convaincu, les Allemands, les Polonais... » Et d'ajouter «
Aujourd'hui ils nous reste simplement à lever la réticence de nos amis britanniques ». Ce n'est qu'une question de temps « je suis convaincu que dans un, deux ans ou cinq, nous finirons par avoir un centre de commandement, de planification et de conduite des opérations en Europe ».

Un vrai Conseil des Ministres de la défense.Outre le Haut représentant pour la politique étrangère et de sécurité/vice-président de la Commission (introduit par le Traité de Lisbonne), le ministre français estime nécessaire pour avoir "ce leadership européen, des réunions plus régulières et décisionnelles des Ministres de la Défense.« Aujourd’hui, la PESD ne peut plus être pilotée avec des ministres de la défense qui se voient pour solde de tout compte, deux fois par semestre, à échéances fixes, dont une réunion informelle - donc en principe non décisionnelle...»

Nicolas Gros-Verheyde

Rédacteur en chef du site B2. Diplômé en droit européen de l'université Paris I Pantheon Sorbonne et auditeur 65e session IHEDN (Institut des hautes études de la défense nationale. Journaliste depuis 1989, fonde B2 - Bruxelles2 en 2008. Correspondant UE/OTAN à Bruxelles pour Sud-Ouest (auparavant Ouest-France et France-Soir).

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