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Atalanta: pourquoi est-ce difficile d’intégrer les bateaux non-UE ?

(B2)Pourquoi ne pas intégrer dans l'armada européenne "Atalanta" les navires de guerre russes, américains, indiens...?  Ce serait logique. Ces bateaux poursuivent le même but : lutter contre la piraterie. Mais ce n'est si simple que cela...

1° Les Européens évoluent, en effet, sous un mandat commun - l'Action commune - et des règles bien précises définies dans un schéma opérationnel - Conops, Plan d'opération, Règles d'engagement... Un Etat tiers qui veut participer doit accepter tout cet ensemble de règles.

2° L'Etat doit accepter de placer ses moyens sous un commandement européen pour une durée fixe bien définie. En clair, une fois sous mandat européen, l'Etat national n'a plus de pouvoir direct de commandement sur les moyens ainsi engagés. D'ailleurs, la plupart des Etats de l'UE (France, Allemagne, Royaume-Uni) qui participent à l'opération n'envisagent pas de mettre tous leurs moyens dans la zone à disposition du commandement d'Atalanta.

3° Enfin, il y a un problème politique et juridique de taille. L'opération Atalanta n'est pas une opération militaire comme une autre. Mais davantage une opération de police, avec tous ses tenants et aboutissants : dissuasion, protection, arrestation. Et l'UE est gouvernée par plusieurs principes d'Etat de droit. L'Action commune a d'ailleurs bien précisé qu'il n'était pas possible de transférer les prisonniers arrêtés vers des pays qui ne respectent les principes fondamentaux des droits de l'homme (garantie des droits de la défense, fonctionnement de la justice et... absence de la peine de mort). Et la peine de mort est toujours en vigueur dans plusieurs des Etats tiers présents dans la zone comme les Etats-Unis et l'Inde. Avec ces pays, la "coordination" est donc davantage de mise que l'intégration.

Relevons au passage l'hypocrisie de certains Etats européens - comme l'Allemagne - qui n'ont qu'une possibilité limitée d'arrestation - de se défausser sur d'autres forces - Américains par exemple -, car elle revient à ne pas respecter le principe défini en commun.

(NGV)

NB: La question chyprio-turque continue également d'empoisonner les rapports OTAN-UE. Ce qui complique l'association de certains pays comme la Turquie ou la Norvège, membres de l'Otan et non membres de l'UE.

Nicolas Gros-Verheyde

Rédacteur en chef du site B2. Diplômé en droit européen de l'université Paris I Pantheon Sorbonne et auditeur 65e session IHEDN (Institut des hautes études de la défense nationale. Journaliste depuis 1989, fonde B2 - Bruxelles2 en 2008. Correspondant UE/OTAN à Bruxelles pour Sud-Ouest (auparavant Ouest-France et France-Soir).

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