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Défense UE (Doctrine)

Lavrov prône Helsinki 2, un nouveau traité de sécurité


Le discours du ministre des Affaires étrangères russe, Lavrov, à l'assemblée générale de l'Onu, samedi 27 septembre, doit être lu avec attention. Même si cette prise de parole est une prise de position, pro-domo, qui tente de justifier, a posteriori, l'action russe en Géorgie, et qu'il n'y a rien de très concret pour l'instant, son analyse de la façon dont la lutte anti-terroriste s'est conduite depuis 2001 et son appel à "revivifier" la sécurité commune euro-atlantique doivent être examinées avec sérieux. Effectivement, comme l'écrit Lavrov, après la crise du Caucase, la situation n'est plus la même qu'hier...  (discours en anglais, télécharger ici).

"La coalition anti-terroriste (née en 2001 d'une volonté commune) est en crise" explique ainsi d'abord le ministre russe. Il cite en exemple l'Irak - "où sous le faux prétexte de combattre la terreur et la prolifération des armes nucléaires, on a violé la loi internationale (et où) a été artificiellement créé la crise la plus profonde. Mais c'est surtout sur l'Afghanistan qu'il s'attarde. "Quel est le prix acceptable de perte de civils dans un conflit et qui décide des critères de proportionnalité de l'usage de la force ?" se demande-t-il. De façon générale, évoque Lavrov, la coalition anti-terroriste semble "être en manque d'arrangements collectifs, par exemple l'égalité de tous ses membres pour décider de la stratégie et, particulièrement, des opérations tactiques".

La privatisation de la solidarité internationale pour servir un monde unipolaire
Pour contrôler "la situation totalement nouvelle créée après le 11 septembre, au lieu d'un effort de coopération sincère, incluant une analyse conjointe et une coordination d'étapes concrètes, les mécanismes tendent vers la création d'un monde unipolaire, signifiant que toutes les décisions sont prises dans un centre unique tandis que le reste doit suivre". La solidarité de la communauté internationale s'est ainsi "avérée en quelque sorte privatisée". Et de dénoncer , "l'illusion du monde unipolaire" qui sème la confusion. En échange d'une totale loyauté, ils attendent de revoir une carte blanche pour recevoir tous leurs problèmes par n'importe quel moyens. Ce "syndrome de permissivité" a permis, selon lui, "hors de tous les contrôles possibles", le bombardement de Tskhinval (par la Géorgie) ! (...)

Le risque d'une réaction en chaîne
Après la crise au Caucase, le "monde a de nouveau changé". Il devient clair que la solidarité exprimée par tous après le 11 septembre doit être revivifiée à travers de nouveaux concepts et construits sur la base du rejet du double standard. (...) La crise du Caucase a prouvé qu'il est impossible ou même désastreux d'essayer de résoudre les prolbèmes existants avec les replis aveugles du monde unipolaire". "Nous ne pouvons plus tolérer de tentatives de régler des situations de conflit en rompant des accords internationaux ou par l'usage illégal de la force. S'il n'est pas mis fin à une telle tendance, nous risquerons une réaction en chaîne," a-t-il ajouté.

Un sommet européen pour refonder la sécurité européenne
"L'architecture existante de sécurité en Europe n'a pas passé le test de solidité dans les évènements récents" affirme Lavrov, qui propose de reprendre les propositions de Medvedev faites à Berlin, le 5 juin, pour développer un "traité sur la sécurité européenne, sorte de 'Helsinki2'". Ce travail pourrait commencer par un "sommet pan-européen avec la participation des Etats et de toutes les organisations travaillant dans la région".

Des principes valables pour toute la région euro-atlantique
L'objectif est de créer un système sérieux collectif qui pourrait "assurer une égale sécurité pour tous les Etats, attestés par "des engagements juridiquement contraignants", en vue de "renforcer
la paix et d'assurer la stabilité et finalement de promouvoir un développement intégré et gérable à travers la région euro-atlantique. Tous les participants devraient réaffirmer leur engagement dans certains principes fondamentaux du droit international comme "le non-usage de la force et le règlement pacifique des litiges, la souveraineté, l'intégrité terrioriale et la non-interférence dans les affaires intérieures, et l'inadmissibilité de renforcer sa propre sécurité en attentant à la sécurité des autres". Des "mécanismes pour assurer le respect de ces principes" devraient être mis en place.

(NGV)

Nicolas Gros-Verheyde

Rédacteur en chef du site B2. Diplômé en droit européen de l'université Paris I Pantheon Sorbonne et auditeur 65e session IHEDN (Institut des hautes études de la défense nationale. Journaliste depuis 1989, fonde B2 - Bruxelles2 en 2008. Correspondant UE/OTAN à Bruxelles pour Sud-Ouest (auparavant Ouest-France et France-Soir).

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