CIG 2007 Pourquoi les Néerlandais ont défendu les services publics ?
(B2) S’il y a aujourd’hui un protocole sur les Services économiques d’intérêt général (SIEG) dans le projet de Traité européen, il faut en reconnaître la paternité essentielle… aux Pays-Bas. Une proposition — qui a rencontré un soutien mollement affirmé des Belges, Luxembourgeois et Français – mais un accueil positif des Allemands.
Une vraie surprise, la vraie surprise même de ce nouveau traité !
Peu de diplomates ou d’experts pariaient, en effet, il y a quelques semaines encore, sur l’incorporation d’un protocole « social » au nouveau traité. Au point que les premières réactions ont oublié ce point (étonnamment au parti socialiste, pourtant ardent défenseur de ce sujet). L’existence de ce protocole rend également pour la Commission européenne — pour le moins réticente sur la question — l’obligation de produire des travaux un peu plus ambitieux sur les SIG et les SIEG que ceux sortis ou prévus jusqu’à alors.
Le dossier "logement social" déterminant
Cette détermination néerlandaise s’explique par un dossier contentieux avec la Commission européenne. Les Pays-Bas sont, en effet, sous le coup d’une enquête de la DG Concurrence depuis juillet 2005 sur la compatibilité des aides d'Etat aux coopératives de logement social, enquête qui continue toujours, précise-t-on à la DG Concurrence.
Les Pays-Bas sont en effet le pays de l’Union européenne qui comprend le plus grand nombre de logements sociaux par habitant (36% de la population habite dans le secteur locatif aidé. Et les 600 coopératives — souvent liées aux collectivités locales — y jouent un rôle primordial. Elles détiennent 75% des logements locatifs (les particuliers en possédant 12 % et les investisseurs institutionnels et les sociétés de promotion immobilière et entreprises de construction les 13 % restants du marché). Le secteur bénéficie de plusieurs dispositifs d’aides : subventions d’assainissement, subventions aux projets, garanties financières, exonération de l’impôt sur les sociétés, de l’impôt sur les mutations, capacité d’emprunt à la Banque des Communes Néerlandaises (BNG). Dispositif considéré comme faussant la concurrence hors des frontières du pays, selon la Commission, car il peut dissuader des investisseurs européens.
La mixité sociale dans le collimateur de la DG Concurrence
La Commission a notamment critiqué le mélange des genres — les coopératives ayant également des activités commerciales — et le croisement des subventions. Elle a également critiqué le concept de mixité sociale, estimant que « les activités de logement des coopératives ne restent pas limitées aux socialement défavorisés. En cas de surcapacité, les coopératives du logement louent les logements à des personnes bénéficiant de revenus relativement élevés, les concurrents commerciaux non bénéficiaires de l'aide publique étant ainsi défavorisés ».
La solution avancée par les autorités néerlandaises qui consiste à limiter la valeur maximum des logements susceptibles d’être considérés comme « logements sociaux » ne règle pas ce problème. Le gouvernement a proposé différentes mesures comme d'introduire un plafond de ressources pour l'accès au logement social (33.000 euros), de séparer les activités commerciales et de service public des coopératives, et de préciser leurs missions de service public, ainsi que de rendre plus transparentes les subventions notamment dans des opérations de restructurations urbaines.
D'autres Cas dans les tuyaux
La DG Concurrence a traité deux autres dossiers dans le domaine du logement social. L’un concerne une plainte de la fédération européenne de la propriété dirigée contre le système suédois de logement social, estimant que le gouvernement a dépassé son rôle classique de lutte contre la ségrégation dans le logement des plus défavorisés. L’autre a abouti à une décision d’interdiction. En mars 2005, la Commission avait en effet considéré comme contraire le système d’exonération de la taxe sur les mutations immobilières pour les sociétés de logement de Berlin ; couvrant l'ensemble de Berlin, et non les seuls «îlots de précarité», « l’aide est disproportionnée », a-t-elle estimé.