B2 Le Quotidien de l'Europe géopolitique. Actualité. Dossiers. Réflexions. Reportages

Brève blogPolitique sociale

Le Fonds mondialisation devra s’améliorer pour réussir

(B2) Les débuts sont balbutiants. Le dossier déposé par la France pour venir en aide aux salariés des sous-traitants de Peugeot et Renault a abouti ces jours-ci par une décision de la Commission européenne. Sauf que le parcours du combattant n’est pas terminé. Avant le versement de la subvention, il faudra encore une décision conjointe du Conseil et du Parlement, lors d’un prochain trilogue budgétaire – cet été si possible, à l’automne sinon - et le déblocage, physique, des fonds par la Commission. Autrement dit près de six mois, après le dépôt du dossier, pour obtenir une somme d’environ 3,8 millions d’euros, c’est beaucoup d’effort pour un résultat modeste, pourraient répliquer les grincheux. Surtout si on le compare aux financements du Fonds social européen, qui compte, parmi ses objectifs, la même finalité — venir en aide aux salariés en situation de restructuration — et est infiniment mieux doté (4 milliards d'euros pour
2007-2013 pour la France).

Jouer les Cassandre serait trop facile. Ce premier dossier a dû essuyer tous les plâtres d’une procédure entièrement nouvelle. Le temps d'instruction administrative a été relativement long. Car il a fallu répondre à un certain nombre de questions : Qu'est-ce qu’un choc dû à la mondialisation ? Comment définit-on un licenciement (il faut plus de 1000 licenciements) ? etc… Et la tendance naturelle, dans les services de la Commission, a été de « blinder » le dossier, pour éviter tout problème au collège. Une prudence qui a conduit à durcir des conditions, déjà très restrictives (conditions plus dures que celles de son homologue américain).

Une procédure lourde, trop lourde ? Le danger qui menace le Fonds n’est donc pas l’afflux de dossiers ou la dérive dépensière, comme le craignaient certains, mais d’avoir un Fonds qui ne distribuerait, au final, que quelques millions par an sur le demi-millliard qui lui est dévolu. Une économie budgétaire, certes, mais un gros risque politique. C’est le symbole de la stratégie européenne, engagée par le trio Blair-Barroso-Merkel, d'une part d’ouverture au monde, d'autre part d’assistance aux personnes concernées, qui risque d’être mis à mal. Certains pourront considérer que l’effet de la mondialisation en Europe est nul et que les effets de celle-ci sont ... imaginaires. D’autre pourront considérer qu’une fois encore l’Europe, c’est la gabegie ou que, naturellement, elle est ultralibérale, etc… Dans tous les cas, la réussite du Fonds de mondialisation est une nécessité, tout autant que le dossier institutionnel, voire
plus…

Pour réussir, le Fonds doit évoluer. La première révision ne saurait attendre. Il paraît souhaitable que les critères d’appréciation, les conditions fixées dans les services de la Commission soient assouplies. Ensuite, lors de la révision des perspectives financières 2008-2009, il faudra bien s’attaquer à cette procédure budgétaire, lourde, trop lourde. A l’heure du moins légiférer, on a réinventé une bureaucratie énorme, injustifiée et injustifiable, au moment où on demande aux Etats membres d’être plus ractifs et moins paperassiers. As-t-on vraiment besoin d’une décision de l’autorité budgétaire pour chaque million d’Euro dépensé. Ne peut-on pas mettre en place une délégation à la Commission jusqu'à un certain plafond ou par
branche concernée par un choc à la mondialisation ?

L’autre danger d’un échec du Fonds. Toute la réflexion sur l’avenir du Fonds social européen pourrait en pâtir. Ce fonds, très utile, bien doté, qui a prouvé son efficacité, souffre d’un manque de visibilité patent. L’effort de communication n’est pas en cause. C’est davantage la globalité de ce Fonds qui est en cause. Comment le réformer. Doit-on à l’image de ce qui s’est fait en matière d’Immigration et d’Asile, (re)venir à des Fonds « fléchés » vers des objectifs (lutte contre l’exclusion, formation, services à l’enfance et aux personnes âgées…) ? Le risque serait d’émietter des objectifs, souvent complémentaires, et perdre en cohérence. Mais un Fonds « Flexicurité » aurait aussi sa place. De même qu’un Fonds « Démographie ». Il y a un moment où les dénominations doivent rejoindre la réalité politique.

 (NGV)

Nicolas Gros-Verheyde

Rédacteur en chef du site B2. Diplômé en droit européen de l'université Paris I Pantheon Sorbonne et auditeur 65e session IHEDN (Institut des hautes études de la défense nationale. Journaliste depuis 1989, fonde B2 - Bruxelles2 en 2008. Correspondant UE/OTAN à Bruxelles pour Sud-Ouest (auparavant Ouest-France et France-Soir).

s2Member®