B2 Le Quotidien de l'Europe géopolitique. Actualité. Dossiers. Réflexions. Reportages

Analyse BlogPolitique sociale

Cinq pistes pour une Europe qui protège

(B2) A l’heure où tout le monde a remis sur son ouvrage la question institutionnelle, il serait bon de se pencher sur le seul sujet qui a été mis sur un strapontin, lors de la Convention sur le futur de l’Europe, la question sociale.

Ceux qui ont suivi la Convention se rappellent que le groupe de travail sur la question n’avait été créé que in extremis. Et son travail avait été réduit à la portion congrue. Peu étonnant que rien n’en soit sorti. Or, c’est sur cette thématique aussi que la question s’est focalisée dans les deux artisans du «Non» à la Constitution (France et Pays-Bas). Aujourd’hui, ne sommes-nous pas en train de refaire la même erreur ? Bricoler des solutions institutionnelles et ne pas se préoccuper du fond...

Certes, il faut le reconnaitre. A de rares exceptions près, la volonté politique de faire l’Europe sociale défaille. La discussion sur les modèles sociaux abonde mais dès qu’il s’agit de passer au concret, les excuses sont là. « Ca ne passera pas», « respect du principe de subsidiarité »... Il ne s’agit pas tant de renégocier les traités, de trouver de nouvelles bases juridiques que de redonner une impulsion décisive. Pour reprendre une image chère à José-Manuel Barroso, - le football -, il faut que le joueur arrête de causer sur le banc de touche sur les stratégies, s’échauffe et rentre sur le terrain pour aller marquer un but, ou du moins essayer de le faire.

Pourquoi l’Europe ne serait pas en capacité de répondre à certains risques que prennent les citoyens ? Pourquoi l’Europe ne deviendrait-elle pas davantage celle qui protège plutôt que celle qui menace ? La plupart des législations - surtout au niveau de la protection sociale - restent fondées sur un tryptique dépassé : une profession, une entreprise, un emploi. Il faut revisiter l’Europe sociale.

Cinq pistes...

1° Le risque dépendance. L’augmentation des personnes âgées exige une nouvelle réponse de l’aide sociale, de possibilité de cumul travail / prise en charge des aînés.... Pourquoi ne pas étudier avant que chaque Etat ne mette au point sa législation, un cadre communautaire global dans lequel chacun viendrait s’inscrire ? Pourquoi ne pas étudier un super-fonds dépendance à l’échelle européenne abondé par exemple des fonds non dépensés au niveau européen ?

2° Le risque formation. L’ambition de la formation tout au long de la vie doit être financé. Ce financement, l’État seul ne peut l’assumer, les entreprises et les salariés devront le supporter. Une telle cotisation ne doit-elle pas être harmonisée au plan européen (assiette, minima et maxima) ? Le compte épargne temps, qui existe dans certains pays, ne devrait-il pas être généralisé ?

3° Le risque travail pour les plus âgés. Malgré de belles déclarations, il reste de singuliers blocages. Si les plus âgés ne sont pas au travail, c’est aussi qu’on les met à la porte plus vite. Faut-il prévoir une obligation d’embauche ? Durcir les conditions de licenciement ? Ou rendre le coût plus lourd ? Prévoir des possibilités de temps partiel allégé ? etc.

4° Le risque flexibilité. La fragmentation des contrats, la mobilité professionnelle existe déjà dans la réalité. Toute inflexion nouvelle dans ce sens atteint ceux qui sont déjà mobiles et flexibles. Et elle durcit les positions de ceux qui bénéficient d’un statut de longue durée. Situation paradoxale : plus on est flexible et mobile, moins on a de droits. Cette équation doit être renversée. Cela passe-t-il par un renforcement du statut des «flexibles» (durée déterminée, intérim, indépendants) ? Faut-il instituer un contrat de travail européen qui se superpose aux dispositifs existants au plan national ? Un peu à la manière de la société européenne qui est une option et non une régression.

5° Le risque mobilité. La libre circulation des citoyens et des travailleurs qui est une donnée fondamentale du marché intérieur n’est pas encore parfaite, chacun en est aujourd’hui conscient. Pourquoi ne pas bâtir un vaste plan pour la libre circulation des personnes en Europe en plusieurs étapes ?

(Nicolas Gros-Verheyde)

Nicolas Gros-Verheyde

Rédacteur en chef du site B2. Diplômé en droit européen de l'université Paris I Pantheon Sorbonne et auditeur 65e session IHEDN (Institut des hautes études de la défense nationale. Journaliste depuis 1989, fonde B2 - Bruxelles2 en 2008. Correspondant UE/OTAN à Bruxelles pour Sud-Ouest (auparavant Ouest-France et France-Soir).

Une réflexion sur “Cinq pistes pour une Europe qui protège

  • Dierckens

    Pourquoi l’Europe ne deviendrait-elle pas davantage celle qui protège plutôt que celle qui menace ?
    Je ne prétends pas y répondre, mais je souhaite simplement attirer l’attention sur la question des services d’intérêt génral. Le parti socialiste européen, les verts européens, la plateforme sociale, les confédération européenne des syndicats, etc. appellent la Commission européenne à proposer une législation cadre pour clarifier la situation de ces services qui remplissent une fonction de cohésion sociale. La Confédération européenne des syndicats a lancé une pétition demandant à la Commission européenne de proposer une législation. Signez cette pétition pour que l’Europe devienne d’avantage celle qui protége:
    http://www.socialeurope.info/spip.php?article3

Commentaires fermés.

s2Member®