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Une présidence bien chargée

(Archives B2) La France qui vient de prendre la présidence de l’Union européenne ne connaîtra pas beaucoup de répit durant les six mois de cette fonction.

Le gouvernement de Lionel Jospin hérite, en effet, de dossiers importants, bien préparés par ses prédécesseurs, le Portugal ou la Finlande, qu’elle devra mener à son terme. Le dossier qui, de l’aveu même du ministre délégué aux affaires européennes, Pierre Moscovici, est « la tâche la plus délicate de la présidence », est celui de la réforme des institutions européennes. Car il touche aux fondements de l’Europe (voir encadré) et est un préalable nécessaire à son élargissement à douze ou treize nouveaux pays.

Ouvert en février par les Portugais, au sein de la conférence intergouvernementale (CIG), il reviendra aux Quinze chefs d’État et de gouvernement, réunis à Nice en décembre, d’entériner cette réforme. C’est à Nice également que devrait être proclamée une « Charte des droits fondamentaux » qui a pour ambition de rendre plus accessible aux citoyens les droits (politiques, économiques et sociaux) que leur garantit l’Europe.

« Rendre l’Europe plus proche des citoyens » est d’ailleurs le leitmotiv de Lionel Jospin. Le gouvernement “pluriel” a ainsi comme ambition, de faire de l’Europe sociale, une nouvelle priorité européenne, en établissant un « agenda social européen » pour les cinq années à venir. Ce « fil rouge de cette présidence », comme se plaît à le nommer Martine Aubry, risque cependant de pâtir du départ de la ministre de l’Emploi vers d’autres cieux, plus électoraux. Un départ plutôt mal perçu par les autres Européens...

Mais la France a d’autres cordes à son arc pour satisfaire l’appétit de travail de ses homologues. Elle veut ainsi poursuivre le dossier de la sécurité alimentaire, renforcer l'étiquetage des organismes génétiquement modifiés (OGM) par exemple ou assurer la traçabilité des produits agricoles. L'amélioration de la sécurité du transport maritime reste, aussi, un autre objectif important avec l’adoption d'un ensemble cohérent et concret de mesures visant à éviter que se reproduire une catastrophe comme l’Erika.

Malgré l’allant d’un Jean-Claude Gayssot, certaines mesures comme l’introduction de doubles coques, par exemple, risquent cependant de se heurter à l’hostilité de certains États, Grèce notamment, qui disposent d’une flotte importante. Et ce dossier pourrait bien ne pas aboutir avant 2001. Qu’à cela ne tienne, quelques “petits” sujets permettront de tenir la rampe de l’actualité, comme la révision de la directive sur l’heure d’été...

Enfin la France a programmé un nombre impressionnant de rencontres extérieures : avec le Japon, la Russie, les États-Unis, le Canada, l’Afrique australe, les pays de la Méditerranée... Une astuce qui permet à la France de redorer, à moindres frais, son blason de puissance mondiale et accessoirement à Jacques Chirac de peaufiner son image de chef d’État. Un calendrier donc bien chargé qui pourrait se remplir à la moindre alerte de l’actualité, sur l’immigration et l’asile, au Kosovo ou ailleurs. Au 31 décembre 2000, il est donc plus d’un diplomate ou d’un ministre de l’hexagone qui pourra crier “ouf”. Avant de passer le relais à la Suède...

(Nicolas Gros-Verheyde)
Paru dans France-Soir, juin 2000

Nicolas Gros-Verheyde

Rédacteur en chef du site B2. Diplômé en droit européen de l'université Paris I Pantheon Sorbonne et auditeur 65e session IHEDN (Institut des hautes études de la défense nationale. Journaliste depuis 1989, fonde B2 - Bruxelles2 en 2008. Correspondant UE/OTAN à Bruxelles pour Sud-Ouest (auparavant Ouest-France et France-Soir).

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